samedi 21 mars 2020

Chat qui tousse n'amasse pas housse (de couette)

L'heure est grave. Quatrième jour plein de confinement et plus personne ne me supporte à la maison. Ou peut-être est-ce juste une question de territoire, me direz-vous. En tout cas, je sens que ma place ici est contestée. C'est pas comme si c'était chez moi, hein.

Prenez mes chats. Ils me réveillent chaque nuit, pour manger, généralement, et viennent se poser pile où mes jambes aimeraient s'étendre. Quand je proteste timidement, je me fais un peu crier dessus. Non contents de perturber mes nuits, ils se sont attaqué à mes journées, désormais.

Sur le canapé.


Dans le code de la cohabitation chats/humain, il y a une légère distorsion, je dirais...

Ils s'installent, prennent leur aise, s'affalent sur moi qui suis moi-même affalée (ça en fait des couches de flegme, de fainéantise et de gras, je vous dis pas) et si j'ai le malheur de répondre au téléphone ou de vouloir bouger un orteil, la sentence tombe: un regard mauvais et hop, ils se retournent et me tournent le dos.

Pour pas dire qu'ils me montrent leur cul. Classe.

Vous aurez remarqué que j'évoque là plusieurs endroits: le lit, le canapé. Car, oui, pour le moment, je fais encore le trajet chambre-salon. Ça me fait un étage à descendre : on nous dit de bouger notre corps pour notre équilibre, moi, je suis docile. Je ne vous fais pas le décompte de mes marches, mais mon escalier, c'est un peu ma méthode anti-obésité du moment.

Bon, en vrai, il y a quinze marches. Pas rien.

Oh, j'entends de loin vos sarcasmes, mais attendez, parfois, je pousse l'effort jusqu'à la cuisine, un espace que j'avais pas mal délaissé depuis mon arrivée pro en cuisine et pâtisserie. Pour vous situer ma flemmardise aigue derrière les fourneaux depuis quatre ans, avant le confinement, je suis allée chercher à mon labo de la farine, du sucre et deux, trois ingrédients qui manquaient à mon garde-manger personnel.

Je m'égare. Aujourd'hui, j'ai donc pris sur moi pour pâtisser, juste pour le plaisir. Avec mon ado. Je vais être un peu brutale pour tous les jeunes parents pensant encore que l'amour surpasse tout : mon ado ne me supporte plus. Le fait qu'il renverse la moitié de l'appareil au chocolat sur ses claquettes Adidas n'a pas aidé à une compréhension et une bienveillance maximales de ma part, on est d'accord.

Mais enfin, quatre oeufs et 250g de mascarpone, dans quelques temps, ça vaudra quelques billets au marché noir. Alors, les gâcher sur des bouts de plastique, fussent-ils griffés, bah, vous voyez, quoi...

Bref, après cet épisode fâcheux, l'ado, cet être décidément étrange et peu concentré, est parti en thalasso maison en me détestant. Entendez qu'il a pris un bain pendant trois bonnes heures.

L'expérience lui ayant visiblement apporté de la sérénité, il ne semble plus me détester ce soir et m'a même proposé 1/ de jouer avec lui à la Playstation et 2/ de faire la glaçage de notre gâteau. Et je vais être honnête : en vrai, je lui dois une fière chandelle, car il m'a offert ce matin une bouffée d'air, de façon très littérale. J'ai dû aller à la pharmacie récupérer des médicaments pour son grain de peau arraché et autant vous dire que j'ai savouré le vent sur mes joues, le son des feuilles et des oiseaux, le calme incroyable des alentours.

Au retour, moi qui refuse habituellement les contenants en plastique, j'ai brandi mon petit sac de la pharmacie de façon ostentatoire, comme un alibi.

Jamais je n'aurais pensé chérir du plastique comme ce matin.
Si, si, je suis obligée de sortir. Non, je ne suis pas une méchante conne qui veut juste prendre l'air pour son confort personnel. Pourtant, je me suis sentie à la fois privilégiée et... soulagée de refermer la porte. Aucune envie de braver l'interdit que je me suis moi-même imposé. Je reste à l'intérieur. On reste à l'intérieur, mon ado, mes chats et moi. Tant pis pour les tensions internes, une paille par rapport au chaos hospitalier.

Est-ce que quelqu'un pourrait néanmoins faire comprendre à mon chat roux que s'il doit éternuer, comme il l'a fait toute l'après-midi, il le fasse dans son coude?

Sont pas sérieux, ces chats.

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