vendredi 14 janvier 2011

En manque

J'ai un aveu à vous faire: je crois que je suis en manque.

Plus rien à me mettre sous la dent.

Mercredi soir, j'ai envoyé (tard) le rendu de ma deuxième mission consécutive. Le lendemain matin, je lisais ceci dans ma boîte mail: "Cela devient Les Temps Modernes ! Du taylorisme ! Merci beaucoup pour votre travail. Reposez-vous un peu".

Et mon interlocuteur de conclure: "Bonne journée".

"Bonne journée?"... "Reposez-vous?" Hein? J'ai le droit? J'suis plus habituée, moi, j'ai besoin d'enchaîner, de foutre mes soirées en l'air sur des retranscriptions, de me saboter mes sorties, je...

En fait, c'est ça, je prends un malin plaisir, quoiqu'inconscient, à pourrir ma propre vie. Et quand je vois un entrefilet d'air bleu, paf, j'en redemande, parce que quoi? Je n'ai pas assez galéré, c'est ça? Je n'ai pourtant pas été élevée par les soeurs, je ne dois m'infliger aucune pénitence. Comprends pas.

Enfin si. Dès lors que j'ai eu cette sorte de "sésame", hier matin, j'ai senti le désoeuvrement me guetter. J'ai besoin de cette activité permanente pour éviter les angoisses, les noyer dans le chaos, les assommer à coups de tâches qui forcent ma concentration et m'évitent ainsi de cogiter.

Oh, je ne me suis pas ennuyée, j'avais dix mille tâches à accomplir et enfin un peu de temps pour Poney. Mais le fait d'avoir quelques heures, quelques jours de répit me laissent dans une sorte d'état second, consciente que ce n'est pas le moment de lâcher l'effort mais balançant insidieusement de l'autre côté du rivage... nommé procrastination. Je l'ai tellement pratiqué celui-là, avec ce sentiment instantané de juste profiter du temps présent. Et celui, plus amer, survenu plus tard, alors même que j'en étais à l'heure des bilans, d'avoir un peu brûlé la vie par les deux bouts dans une forme d'immaturité qui me sidère moi-même aujourd'hui.

Pas de regret, pas de remord, je devais en passer par là, je crois, pour prendre conscience des désirs qui m'animent aujourd'hui. Parce que quitte à "me reposer", ou PIRE, à ne rien faire, j'ai choisi de faire un tri dans des courriers, des documents, des petits textes, de gros pavés pondus en vrac... Allez faire le constat, vous-même, reprenez vos échanges sur le oueb depuis une année précise et remontez le fil. L'expérience est pleine d'enseignements. Parce que, avec le recul, avec un regard dépassionné sur les événements - parce que finalement pas si importants, parce que oubliés, parce que lointains, parce que dépassés - c'est comme si on mettait un peu d'objectivité sur ces pans de vie pourtant si marquants alors. Comme si tout ceci ne nous appartenait plus vraiment. Comme si on était devenu autre.

Toutes ces traces de l'espoir, de l'exaltation, de la naïveté, de l'enthousiasme... Tous ces signes de chute sans fin, de déprime, de dépression latente et de retour à la vie... Sans chercher à assembler le fouillis de cette vie, j'ai vu dans ces repères que l'on laisse, chacun dans notre quotidien, le signe que des choses avaient changé, que les priorités n'étaient plus les mêmes et que j'avais l'impression d'avoir laissé la petite fille au bord de la route pour reprendre, enfin, les rênes. Pas de quoi garantir une voie tracée et sans heurts, bien sûr, mais au moins l'assurance de reprendre un semblant de contrôle que j'avais perdu.

Serait-ça, devenir adulte?

Je crois que je vais aller prendre de la drogue, je deviens trop normale.

4 commentaires:

  1. Et si tu en profitais plutôt pour passer un peu de temps avec ton Loulou, juste pour le plaisir ?
    Bises, la Mouette.
    Thierry

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  2. Touches-y, à la came, et je monte jusqu'à Nantes te voler dans les plumes ! non mais ho...☺
    Ceci dit, je comprends parfaitement cette sensation.

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  3. Waouh, une salve d'applaudissements pour Anne, qui a remonté tous les posts! Bon, tu vois, y'a pas eu de grandes mouvements! A bientôt, ici même...

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