samedi 24 décembre 2022

Hors jeu (ou pas)

 Ce matin, en scrollant sur Instagram, j'ai vu défiler les bûches par milliers sur les différents comptes que je suis. Les lutins s'étaient agités toute la nuit pendant que je dormais du sommeil du juste.

Pour la première fois depuis six ans, Noël n'a pas été l'enfer. Pendant que chaque pâtissier virevoltait, coupait, glaçait, décorait, emboîtait, je dormais, me reposais, écoutais, méditais, réfléchissait au sens de la vie,  soufflais... Oui, je respirais.

Au delà de ce sentiment réel de délivrance, j'ai perçu cette pointe d'amertume: je me suis sentie soudainement hors-jeu. Comme si je faisais un arrêt sur image pendant que les autres continuaient de courir. Quelque chose de totalement paradoxal m'a traversée. Car le mode "pause", je ne l'ai pas choisi, mais je l'ai très bien accepté. Je me sens dans le vrai, alignée comme jamais, métamorphosée.

Et je me dis parfois que finalement, je ne suis pas si hors-jeu, comme si Abricotine m'avait fourni le mode d'emploi pour vivre mieux. Je suis même sans doute dans le vrai, dans cette réalité qui est la mienne et qui m'est propre.

Est-ce vivre mieux quand sa vie est entre parenthèses? L'hyperactive que j'étais vous certifierait du contraire. La paresseuse contrariée que j'ai toujours été vous dirait que je vis ma meilleure vie.

En fait, il n'y a pas de mode d'emploi de la vie idéale. Certains, fortement impactés par le rythme pro, rêveraient de s'adonner à un repos quasi illimité, au moins quelques mois, sans contrainte (ou presque), comme je le vis actuellement. Résultat d'un trop-plein, évidemment. 

D'autres, dans mon cas, se morfondraient de rythmer ses journées par des allers-retours dans un centre de cancérologie et d'y croiser de "vrais" malades - oui, oui, je nuance et relativise; je vous assure que mon cas est anecdotique, si je devais comparer.

Moi, je ne peux pas vivre la situation autrement que comme une éclaircie!

Je me souviens de ce jour, mi-décembre, où, partie en livraison, j'ai frôlé l'accident de la route. J'ai pilé, j'ai réussi à éviter ce crash. Pour tout vous dire, ça m'a sorti de ma somnolence car oui, je m'étais endormie au volant. Le coeur palpitant, j'ai pensé à ce qui se serait passé si la voiture m'avait percutée.

 J'en ai rêvé, pour tout vous dire.

Oui, dans le sens où je l'ai espéré, tant j'étais à bout et je voulais que ça s'arrête, que la pression stoppe, que mon esprit puisse s'évader, que mon corps endolori puisse se reposer.

J'ai été cette femme surmenée, vivant de l'adrénaline mais ne l'assumant plus.

Certains pâtissiers ne vivent pas Noël comme un enfer, j'imagine. Moi-même, j'éprouvais un réel sentiment de satisfaction lorsque les dernières bûches avaient quitté la chambre froide. Je savais quel plaisir nous allions apporter sur les tables familiales, que la mission était accomplie. Mais quelle dureté, parfois! Ce tourbillon qui m'emportait chaque année me laissait vide et épuisée, asséchée, là où d'autres passionnés vivent sans doute le moment comme une apothéose. 

Mais justement, ne cherchons pas à comparer. Je vis ce que j'ai à vivre et c'est en cela que je me sens si sereine.

Je vous souhaite, pour Noël, de ressentir cet apaisement personnel et de pouvoir goûter, vraiment, aux saveurs, petites ou grandes, que la vie nous propose.

4 commentaires:

  1. Que ce Noël spécial te profite, à chacun son Noël bizarre, nous c'est la 1ère fois que nous le fêtons sans mon Papa...La roue tourne, il faut s'y faire...
    Que l'année à venir te soit douce et positive, bonnes fêtes la Mouette !
    Sylvie et Olivier

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  2. "je l'ai rêvé... je l'ai espéré... je voulais que ça s'arrête"
    Abricotine n'est pas venue par hasard, elle n'a fait que te permettre de faire ce que tu ne parvenais pas à faire.

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