samedi 12 février 2011

Ne laissez pas la fatigue vous conduire

L'esprit embrumé d'une nuit trop courte, je tentais un nécessaire relèvement des paupières. L'opération était d'autant plus délicate qu'il me fallait garder les mains sur le volant et, surtout, le cap sur cette autoroute A11 que je ne connais que trop bien. C'est là que j'ai vu, entre amusement et mélancolie, le message qui s'affichait sur un panneau lumineux de Cofiroute:

Ne laissez pas la fatigue vous conduire.

Amusement, parce que je me battais très prosaïquement contre cet état comateux qui m'envahissait. Mélancolie, comme celle que je ressens toujours sur ce bitume, quel que soit le sens que j'emprunte. Le Mans / Nantes ou Nantes / Le Mans, les questions reviennent, incessamment et je me suis plus ou moins résignée à les entendre, comme un refrain entêtant, parce que je laisse encore trop l'affect guider mes pas.

Oui, parfois, la fatigue me gagne, la fatigue morale de porter constamment les choses sans pouvoir se délester un minimum. Sur quelqu'un, sur quelque chose, du moment que ce soit rassurant. La fatigue me gagne de chercher constamment cette tranquillité d'esprit que je fuirais pourtant, je l'imagine aisément, si je finissais par l'atteindre.

Question de torturée, vous me direz? Question de torturée, vous répondrai-je.

Pourtant, cette injonction me convient bien. Ne laissez pas la fatigue vous conduire... J'aime contrecarrer cette fatigue. La lutte permanente contre la galère, contre les idéologies galopantes qui prennent corps et s'enracinent chaque jour plus profondément - à mesure que la crise nous englue tous dans l'immobilisme ou la précarité - la lutte contre soi-même et le repli sur soi... Voilà des batailles qui tiennent éveillé. Lorsque je vois ces révoltes en Afrique du Nord, je me dis qu'au delà de la résignation et de l'ignorance, l'espoir existe, que chacun est capable de lutter contre l'aphasie et de relever les paupières. De façon beaucoup moins prosaïque que moi, à deux de tension, dans la douceur de ce samedi midi.

Oui, l'enjeu est autrement plus important, au delà de la Méditerranée, et je m'auto-consterne parfois (si, si, on peut s'auto-consterner, j'en suis la preuve. Et pis d'abord, je fais ce que je veux, je suis chez moi ici) de ne voir que mon petit nombril là où les guerres et les luttes sont autrement plus fondamentales ailleurs. Question de relativité bien sûr, question d'enfant gâtée qui peut se permettre quelques états d'âme comme s'il n'était pas plus urgent de lever le petit bout de son nez pour regarder au loin ce qui s'y passe.

Quoi? Ah, oui, vous avez raison. Je suis fatigante, parfois;)

2 commentaires:

  1. Mais non, mais non ! ;-)
    Bises, la Mouette.
    Thierry

    RépondreSupprimer
  2. Déjà, avant de regarder au loin, regarder devant soi, et agir au quotidien. CCe qui est inacceptable, ne pas l'accepter. Oser. " Ils" nous montrent aujourd'hui, ailleurs, le chemin que nous leur avons montré il y a deux siècles en nous engageant sur la voie de la démocratie. Et nous ne serions plus capables de ruer dans les brancarts ? de dire non à ce qui ne peut plus se subir ? En ce cas, nous serions devenus de sacrés dégénérés...
    Non, je crois que devant ce qui s'insinue, de façon larvée, dans nos quotidiens occidentaux, et qui bafoue nos valeurs réelles et fondamentales, nous avons le devoir de le contrer. Et, si nous en avons le devoir, alors nous saurons en avoir le pouvoir. Il s'agit juste de dire "non", de plus en plus fort, ç ce qui ne peut s'admettre.
    'tain, je deviens vachement moraliste, moi, je serais bien quadragénaire, on dirait....:)

    RépondreSupprimer