samedi 11 avril 2009

Interdit de rire

Au début, quand on est au chômage, on se sent un peu en vacances. Enfin, je généralise peut-être. Moi, je me sentais ainsi, en tout cas. Plus de travail, plus de raison sociale, plus d'histoire de semaines à 35 heures (un concept inconnu là où je bossais), de récup', de congés payés. Plus de déplacements, ni de reportages. Plus de hiérarchie. Plus de collègues, non plus.

Le premier jour de ma nouvelle vie, je me suis d'emblée méfié de ma nature nonchalante. Ce jour-là, c'était un samedi et un jour férié. Double raison de m’étirer paresseusement dans mon lit. En jetant un oeil sur le réveil, je me suis simplement retournée. J'ai remis la couette sur moi, en songeant à ce qui m'attendait. L'hibernation? Hum, pourquoi pas. Se replier sur soi-même et savourer l'agitation ambiante... Un peu vain. Reprendre la main sur sa vie ? Trop tôt. Non, j'ai juste eu envie de souffler, à cet instant. Tout en ayant bien à l'esprit que les vacances, les vraies, n'ont pas tout à fait la même saveur...

Début novembre, c'était un vrai cliché. Le ciel bleu, le temps sec des jours qui précèdent l’hiver, quand vous avez à la fois envie de vous emmitoufler et de vous dorer au soleil sur un banc. Désormais, j’avais le temps mais mille choses à faire. La première, c'était de profiter de mon fils, qui devait se souvenir davantage des jeux de la garderie que de sa propre chambre ces dernières semaines. Subitement, je me suis sentie hors du temps. Je planais, même. Cette immense sensation de soulagement, d’avoir repris le contrôle de ma vie, avec ce sentiment grandissant d'être à contre-courant.

Je me suis parfois surprise à freiner mon enthousiasme, à cacher mon sourire. On aurait perçu mon attitude comme arrogante, provocante, dans ce monde qui n'a plus envie de rire, où prendre du recul semble ne concerner que les inconscients. Interdit de rire. Chaque jour la même rengaine. Pendant que je relevais la tête, fièrement, j'ai vu ces gens dans la rue, rentrer la leur, comme des tortues. Peur d’être touchés par la crise mondiale, peur de ne pas s’en sortir, de tout perdre, de couler. J'ai compris ce besoin de s'accrocher à ses petits acquis.

Pourquoi alors ne me sentais-je pas concernée? Je me souviens avoir regardé une hôtesse d’accueil au supermarché en me disant qu’après tout, quand j’en aurais fini avec cette drôle de période qui commencait, je pourrais peut-être postuler. Trouver un job.

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