dimanche 2 août 2009

I am a larve

Comment passer de l'hyperactive à la larve, stade comateux avancé? Je ne peux même pas l'expliquer, j'ai une faculté à procrastiner que je crains énormément - car j'ai peur qu'elle me soit fatale. Mais je ne peux pas la nier. J'aime avoir le nez au vent, regarder les gens, écouter au loin.

Comme tout le monde, en somme. Vous voyez, je suis tellement paresseuse que je ne me cherche même pas d'excuses.

Simplement, je m'interroge. Comment, donc, ai-je pu passer en une semaine d'une névrosée survoltée - aux aguets, prête à signer pour le moindre pas-de-porte à moins de dix milliards de dollars - à la glandeuse que je suis aujourd'hui, seulement animée par quelques expressions, genre, "on va à la plage", "on file au ciné", "tu prépares à manger?" Le top du top étant : "on va dormir?"

Je sais, ça s'appelle se relâcher. Faire un break. Prendre des vacances. Mais une part de moi-même reste consciente qu'au moment où tous les autres vont reprendre le chemin de l'école, moi, je vais rester sur le quai. Pas pour filer aux Seychelles mais bien pour pointer, mois après mois, auprès de mon employeur, que j'ai l'immense désavantage de partager avec trop de monde.

Pôle Emploi.

Alors, bien sûr, diverses solutions s'offrent à moi : acheter mon resto et l'ouvrir, essayer de n'empoisonner personne, histoire de ne pas alerter la DSV et surtout, de ne pas fermer au bout de deux semaines; aller jouer à la marchande; me bouger et élargir mes horizons.

Oui, mais là, un 2 août, désolée, j'y arrive pas. J'ai déjà du mal à me projeter, habituellement, mais alors là, c'est comme si j'attendais que le temps suspende son vol. Comme si je pouvais rester dans cet état de nonchalance tellement jouissif...

L'incroyable avantage d'avoir à ce point déconnecté des réalités - qui vont me revenir au visage tel un boomerang, très vite, j'en ai conscience - c'est que je savoure à plein la moindre parcelle de ce temps off. Quelques éléments m'ont aussi permis de voir la vie autrement... Exemples?

- Je fulmine. Plus de trente minutes à poireauter dans une salle d'attente tristoune, je songe sérieusement à vider les lieux... quand IL arrive. Il présente ses excuses pour son "léger retard". Je lève la tête et bégaie: "du retard? Non, pas de souci, ce n'est rien." Je bénis mon idée géniale d'être montée sur un trampoline et d'avoir appelé, au hasard, cet ostéo. C'est une bombe. La midinette en moi est de sortie, me voilà toute émoustillée et donc, toute débile. Lorsqu'il me tend ma barrette, que j'avais posée sur la table de massage et qu'il avait ramassée, je ne vois que ses yeux. Il racle sa gorge. Ah, la barrette. Je le fixe, énamourée, et lui voulait juste me la rendre. Un grand moment de solitude. Peu importe, il veut absolument me revoir. Ça tombe bien, moi aussi. Bon, lui, c'est juste pour me remettre le dos en place, mais on va pas chipoter pour si peu, si?

- Elle a l'air d'une enfant. La rondeur de ses joues, la façon qu'elle a de plisser ses yeux si candides, son sourire timide, sa coiffure un peu sage, sa joie non contenue de faire partager sa passion. Sa voix légèrement éraillée, la profondeur qu'elle dégage révèlent dans le même temps toute sa féminité, toute sa complexité. J'avais découvert Sophie Hunger par hasard, un soir chez Nagui. Une Suisse, qui m'avait ensorcelée de son "round and round" mais qui a pu me toucher en allemand - une langue qui m'est totalement étrangère et me semble un rien rebutante, je le concède. Pour la première fois de ma vie, je suis à deux mètres d'une scène, moi qui ai le chic pour me retrouver bien coincée à dix mille lieux de là, d'ordinaire, et je suis bouche bée, devant tant de naturel, de grâce, de talent. Elle me semble tellement heureuse d'être là, de prendre sa guitare, de chanter, parce que depuis gamine, sans doute, elle en a rêvé et que, aujourd'hui, on la sollicite pour s'exprimer. Je me dis que toute l'essence de la vie est là, dans cette possibilité que l'on a, un moment, d'être exactement ce que l'on a envie d'être. Ensuite, je me dis que je devrais prendre mes gouttes et que, quand même, les festivals estivaux, c'est à la fois extra et crevant- plus de mon âge, pour résumer.

- Il me regarde. Je suis surprise par l'intensité de ses yeux si bleus, si brillants, si mutins. C'est mon loulou, que je retrouve et, avec lui, le sentiment immédiat d'une félicité logique et pourtant folle. C'est long, trois semaines, sans lui.

- Il la prend dans ses bras et, au moment de la jeter à l'eau, freine son élan et la dépose à la surface. Mon papa est désormais papi et il en a conscience. En reproduisant les gestes de notre enfance, il les adapte seulement aux réalités d'aujourd'hui. Ma nièce rit aux éclats, mon fils l'imite. A regarder mon père s'amuser avec ses deux petits bouts, en leur demandant - comme il le faisait avec nous - de ne pas lui mouiller ses cheveux, alors qu'ils sont dans l'océan, et de ne pas aller trop loin, je me sens projetée une trentaine d'années en arrière. Une vraie madeleine.

- Elle est restée alerte, joue avec les nerfs des autres, manipule. Les marques du temps n'ont pas épargné son visage et le creusent chaque jour davantage. Sourde quand elle en a envie, mais réceptive dès que l'on parle d'euros, elle sait gémir pour mieux se faire entendre. Elle dit ne plus pouvoir lire que "les annonces funéraires" mais ses yeux clairs ne peuvent cacher le trouble ou la jouissance qu'elle ressent à faire tourner en bourrique son entourage. Nos relations ont souvent été délicates, mais cette fois-ci, en allant voir ma grand-mère, j'ai eu soudain envie de lui poser tout un tas de questions sur l'enfant et la femme qu'elle a été. Pourquoi cela m'est-il venu, maintenant, et pas lorsque nous pouvions encore discuter sans devoir allumer un cierge pour qu'elle entende? En tout cas, j'ai eu un élan d'affection pour elle, ce jour-là, sans pouvoir l'expliquer, mais simplement heureuse de pouvoir ressentir cela d'une femme que j'ai souvent considérée comme une tatie Danielle.

- Nous sommes dans le noir, j'ai de grosses lunettes de mouche et c'est pas plus mal, car cela me permet de cacher les quelques larmes que je n'ai pu contenir. Alors là, c'est la première fois, je crois, que je pleure devant un dessin animé. Allez voir "Là-haut" et vous comprendrez sans doute comment il est possible de s'émouvoir devant une production Pixar.

Voilà, vous aurez compris que j'ai deux de tension et un taux de niaiserie assez conséquent, actuellement. Je ne tiens même pas à me soigner, ça fait du bien aussi. Et si vous êtes gentils, je vous parlerai dès demain de ma grande découverte d'un truc que des tas de gens connaissent depuis un petit moment, semble-t-il...

3 commentaires:

  1. Joli résumé semble-t-il de quelques jours... J'adore... C'est bien de pleurer au cinéma...

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  2. Oh que non que tu ne vas pas rester en rade ! Et d'une parce que tu as la volonté, sans quoi tu n'aurais pas parcouru tout ce chemin vers ton rêve. Et de deux parce que sinon, je me pointe pour te tirer les oreilles (avant de te donner un coup de main). Tu as le droit de comater un peu pendant les vacances mais je sais que dans 15 jours, tu seras à nouveau à l'ouvrage. J'ai confiance en toi.

    Bises
    L'oiseau

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  3. Un truc que des tas de gens connaissent depuis un petit moment, la Mouette....?
    je grille de curiosité tout soudain.....
    J'aime bien ce post, il confirme en tout point ce que je pensais : tu vis !

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