dimanche 27 juin 2010

Les rois Soleil (les chiens font pas des chats)

Soucieuse d'enrichir mon expérience de serveuse, et surtout consciente de la pénibilité du stand chamboule-tout où on doit ramasser des boîtes de conserve tout l'après-midi (sans parler du fatras métallique qui finit par vous taper sur le système), je me suis dévouée pour tenir la buvette, hier, à la fête de l'école.

Je sais, ma vie est absolument incroyable.

Au début, c'était royal. Les enfants, plutôt calmes, sont arrivés, attendant leur tour. Un verre de coca, siouplait, steplait, peu importe, les phrases étaient cohérentes et teintées de politesse.

Est-ce la chaleur, l'excitation, toujours est-il que l'ambiance a un rien dégénéré. Le caïd de l'école, 7 ans, est arrivé et a exigé, sans un mot, un verre et un gâteau, accompagné de son père. J'ai compris pourquoi le gamin était ce qu'il était. Le père, donc, sans un bonjour, s'il vous plaît, merci, s'empare d'une part de flan et file à l'anglaise. Soit. Il revient, un bon quart d'heure plus tard, remonté comme un coucou. "Oui, MON FILS - ce Roi, ce Seigneur - a mangé du flan, j'ai peur qu'il soit malade!"

Perso, je ne mets pas de cyanure dans mes pâtisseries, qui plus est quand je ne les ai pas cuisinées. Je reste zen.

"Ah bon, mais pourquoi pensez-vous cela?"

"Mais enfin, ce flan était en plein soleil!"

Là, s'il le pouvait, il me giflerait. En tout cas, ça prouve qu'il m'avait vue, tout à l'heure, et que je n'étais donc pas transparente. Bref. Il repart, visiblement furieux. Ça lui passera.

Ensuite, un autre gamin survient, me tend son verre et dit, me montrant une bouteille, "j'en veux." Sous l'oeil attendri de sa maman, évidemment. Je lui précise que je suis en train de servir l'un de ses camarades et que si le Roi-Soleil veut bien patienter deux minutes, il aura sa ration de calories dans deux minutes.

Il prend le même regard noir que sa môman. Ils sont outrés tous les deux. Et il relance son appel dans la foulée. Une fois, deux fois, dix fois. Là, l'envie de lui en coller une m'effleure mais j'imagine déjà les dégâts. Énervée, j'en casse une assiette. Et quand Môssieur est enfin servi, il repart sans un mot, sa chère et tendre Madame Mère me jetant un dernier regard courroucé.

Arrive le moment de la fantastique animation de nos chères têtes blondes, qui chantent et dansent quelques minutes, présentant là, visiblement le pestacle de fin d'année. Avec mes camarades serveurs, j'abandonne la buvette, histoire d'applaudir ce moment d'anthologie. Quand je reviens, c'est l'orgie, des enfants, mais aussi des parents - oui, oui - se sont emparés des bouteilles et se servent, sans vergogne. Super-gendarme arrive, rétablit un peu l'ordre, et réquisitionne les bouteilles, suscitant quelques moues déçues de part et d'autre.

...

Bon, je sais, je n'étais pas là pour prôner la politesse et le sourire comme valeurs primordiales. Les enfants ont des parents pour ça (ah ah). Néanmoins, effarée par de telles attitudes, je m'improvise donneuse de leçons (quoi, on était bien dans une cour d'école, non?) et je suggère doucement à quelques réfractaires de compléter leur phrase. "Bonhomme, il manque un mot, là." "Je n'ai pas entendu, ma puce, tu demandais...?"

A côté de moi, un papa d'élève que j'apprécie assure que je me formalise trop sur le manque de politesse de ces bambins.

C'est vrai, quoi, c'est pas comme s'ils avaient besoin d'être éduqués.

Quelques minutes plus tard, son aîné me demande une boisson. Je comprends pourquoi le père a réagi sur mon manque de souplesse. Le gosse est malpoli, sec et intransigeant. Je sais, ça fait beaucoup pour un gosse de dix ans.

A ma gauche, un autre papa d'élève me soutient, refusant carrément de servir quiconque oublie ces fameux "mots magiques" que les parents, ces gens bien sous tout rapport, sont censés inculquer à leur progéniture.

Je jubile.

Finalement, la plupart d'entre eux connaissaient ces petites marques de civilisation, il fallait juste les inciter à se comporter comme des enfants polis, et pas comme des petits monstres mal léchés à qui tout est dû. Pour eux, le cas n'est peut-être pas désespéré.

En revanche, pour les parents, je crois que c'est peine perdue. Le pompon, c'est cette dame BCBG qui s'est offusquée que je ne lui remplisse pas jusqu'à ras-bord un verre qu'elle ne payait pas, de toute façon. Et qui, en aucune manière, n'a bougé ses fesses pour participer activement à l'un des stands. Sincèrement, j'étais à deux doigts de lui balancer le verre de jus d'orange sur son joli visage pincé.

Je me suis retenue. J'avais déjà chopé des coups de soleil, sous le cagnard. Pas la peine d'y ajouter quelques coups de griffe.

3 commentaires:

  1. Comme je te comprends ! Beaucoup de parents oublient ce que leur ont inculqué leurs propres parents. Autres temps, autres moeurs. Et c'est désespérant.

    L'oiseau

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  2. T'as compris pourquoi je bosse pas dans le secteur de l'éducation ! Je serais déjà en taule pour meurtre.....:))

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  3. tout fout vraiment le camp...! ils font tous comme les Bleus ...! consternant !

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