dimanche 10 janvier 2010

Ma petite madeleine

Sans mémoire, on peut vivre, mais peut-on réellement exister? Ce soir, je regarde ces reportages de Zone Interdite - pour une fois, on n'est pas dans le racolage, mais je crois que je dois confondre avec Capital, en fait - qui évoquent la mémoire oubliée de ces personnes devenues amnésiques.

Le constat est terrible, l'impact sur les familles énorme et le blocage palpable. Le débit des interlocuteurs est un peu lent, le regard dans le vague et la souffrance réelle. Ces gens ont survécu à des accidents - de la vie, de la route- mais y ont laissé leur mémoire. Pourtant, étonnamment, certains ont conservé leurs souvenirs de leur vie d'avant. Incapables de raconter le début d'un film qu'ils ont vu voilà quelques minutes, mais se rappelant leur mariage ou la naissance de leurs enfants, trente ans avant.

C'est cela, je crois, qui leur permet de tenir, de s'accrocher à une vie dont le présent n'est qu'absurdité et oubli.

J'ai la chance de ne souffrir d'aucune maladie. Et je chéris cette mémoire qui me permet de nourrir mon quotidien. Cultivant une mélancolie qui me poursuit depuis mon enfance, j'ai à coeur de revivre régulièrement ces souvenirs -bons, moins bons - ces rencontres, fructueuses ou pas. Ce retour volontaire, dans un passé que je ne veux pas idéaliser, me donne un peu de baume au coeur - ou une piqûre de rappel, selon les circonstances.

C'est une sorte de parenthèse que je m'octroie, avant de reprendre pied dans le présent.

Je sais qu'il n'est pas bon de vivre dans le passé. Je ne peux nier une certaine nostalgie, je le concède, de mes premières années insouciantes. Je les revis parfois, simplement en regardant mon fils, lui qui franchit de nouvelles étapes, jour après jour, insolent un instant, candide et touchant la minute suivante. Son étonnement et sa joie de vivre me replongent quelque part dans une cour d'école, à la découverte de nouvelles sensations, de nouveaux copains. D'ailleurs, je le sens attentif dès lors que je lui raconte une histoire de mon passé. Il me demande de répéter, et pose des questions, encore et encore, comme émerveillé que sa maman ait pu ressentir les mêmes choses que lui, aujourd'hui.

Et quand le futur est incertain, c'est bon de se souvenir de l'enfant que l'on a été, de la lueur que l'on avait dans les yeux, tellement curieux de vivre notre vie. Avec cette candeur et cette envie d'apprendre. Et cette gourmandise à croquer la vie qui tend, hélas, à s'éteindre si l'on n'y prête pas attention.

7 commentaires:

  1. Oui, surtout que le monde est organisé dirait-on juste pour nous voler cette joie de le découvrir qui en fasait tout l'attrait...rester curieux, rester ouvert, c'est pas si simple...mais c'est ça l'essentiel, enfin, un peu....

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  2. Et pourtant, il y a certaines choses que j'aimerais rayer de ma mémoire, certains épisodes qui continuent à me faire mal et à me paralyser, parfois.

    Bises
    L'oiseau

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  3. N'y a-t-il pas une leçon à tirer de toutes les expériences, bonnes ou mauvaises? Moi aussi, il y a des choses que j'aurais envie de rayer de ma mémoire et en même temps, elles m'ont conduite à être la personne que je suis aujourd'hui, avec ses défauts, certes, mais plus lucide, moins naïve. Plus mûre, tout simplement!!

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  4. Tu sais quoi ? le jour où tu l'ouvriras, ton restaurant, je trouve que "ma petite madeleine", ça sonne bien mieux que "ma p'tite dînette" ! Certes, ça t'oblige à avoir sans cesse à ta cartes ces délicieuses petites choses que tu n'avais pas eu le temps, finalement, de concocter ici, mais quelque chose me dit que ça ne te ferait pas peur... Bises

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  5. Oui, c'est bon, ça, en plus tu peux faire du sucré, du salé... Si, si, j'avais pu en faire au Café Clochette, finalement, d'ailleurs, tu m'inquiètes, il en restait quelques-uns quand j'ai quitté le restau, dans une boîte... je n'ose imaginer leur état si elles ont été oubliées!!! bizz

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  6. Euh non pas oubliées, mais englouties dès le lundi par une visiteuse ! quand même, on a le respect du bon produit ;-)

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