samedi 19 décembre 2009

Malaise

Bon, en préambule, j'en ai un peu marre de moi-même, à m'auto-apitoyer sur mon sort et à rester négative, au lieu de relativiser et d'avancer. L'inactivité ne me va pas et dans le même temps, j'ai l'impression de m'y complaire. Mais, pas d'inquiétude, ça va passer. Voilà, c'est dit.

Hier, j'ai appris, sur le monde.fr, que Pôle Emploi allait recruter 1000 CDD en renfort, du fait de la recrudescence de demandeurs d'emploi . Et surtout qu'en moyenne, un conseiller s'occupait de 90 à 95 personnes.

Je comprends mieux pourquoi ils me foutent la paix.

N'empêche, ça m'a angoissée. Mais pas autant que ma virée de la journée.

Pour tout dire, j'invite ma famille à Noël. Me maudissant de ne pas avoir planifié plus tôt mes menus, j'imaginais déjà la cohue dans les magasins. Et je suis donc partie, appréhendant la crise de nerfs imminente, le magasin aussi vide qu'un supermarché polonais et des kilomètres de file d'attente.

En fait, rien. Les rayons étaient remplis de tout ce que je souhaitais - du coup, je me suis un peu lâchée sur le vrac de la Biocoop, miam - j'ai vu des caddies pas plus garnis qu'habituellement et j'ai attendu normalement à la caisse. Même topo au supermarché.

Euh, ils sont où, les gens?

Ah, ils bossent, c'est vrai. Habituellement, ça ne les empêche pas de se démultiplier comme par magie à quelques jours de la Noyel.

L'après-midi, l'oeil attiré par une robe en vitrine, je rentre dans la boutique. C'est une enseigne connue, mais là, c'est la première fois que je vois ça: personne. Il n'y a que les deux vendeuses dans cet espace devenu soudainement trop grand.

Je crois entendre le soupir de soulagement de l'une d'entre elles qui, au vu de son empressement et de ses bras - ankylosés par l'ennui - qu'elle décroise rapidement, n'a accueilli aucun acheteur potentiel depuis un moment. Elle me parle de la promo en cours, deux articles achetés, le troisième à un euro.

A quelques jours de Noël? A quelques jours de Noël.

La pauvre, je repars les mains vides, sans la robe. Je vais me rattraper en dévalisant une épicerie fine, faire un stock de nigelle, que j'ai découvert grâce à la cafelière, d'épices pour le pain... d'épices et tout un tas de fèves de cacao et autres jolies promesses culinaires. Je pousse jusqu'à une librairie d'occasion, m'enquiers du dépôt d'éventuels livres de ma bibliothèque. "Oui, oui, on prend de tout", m'assure la vendeuse, avant de préciser, un peu gênée, "mais si vous pouviez revenir en février, ça nous arrangerait. On n'achète plus, en ce moment."

Les clients non plus, laissant des boutiques avec des stocks à ne plus savoir qu'en faire. Noël ou pas, le temps de la récession est venu. Ce n'est pas une vie de l'esprit, cette crise. Simplement, jamais je n'avais senti à ce point son impact, au quotidien, et perçu un tel désarroi.

Oh, bien sûr, on peut se passer de cadeaux, stopper cet élan consumériste qui nous pousse à claquer des sommes folles, de façon rituelle, pour des présents qui finiront parfois dans un placard ou... sur un site d'enchères en ligne.

Oui, il y a bien pire, comme la situation de cet homme, recroquevillé sur le bitume froid, avec sa pancarte "j'ai faim", un homme comme vous et moi, pas rongé par l'alcool, simplement dans le besoin. Qui me fait mal et pitié. L'autre jour, en sortant de l'école, mon loulou lui a donné la barre de céréales de son goûter (aucun mérite, la friandise n'est pas au goût de mon enfant gâté, bien content de ne pas l'avaler. Pff...).

L'homme ne feintait pas, il l'a mangée en baissant les yeux. Je l'ai croisé de nouveau hier soir. L'air était glacé, piquait les yeux, quelques flocons tombaient et lui, il était là, attendant.

Le malaise.

Oui, il y a bien pire, comme cette femme dont tous les pores suintent l'alcool, achetant ses canettes de bière premier prix, en bas de chez moi, et un sac plastique pour les cacher.

J'ai toujours considéré Noël comme une sorte de break par rapport au reste de l'année. Malgré de drôles de souvenirs - familiaux, amicaux - c'est un moment que j'affectionne. Depuis la naissance de loulou voilà six ans, la magie de Noël a retrouvé un sens.

Mais là, je le concède, j'ai du mal à voir l'éclaircie. Cela ne doit pas nous empêcher d'avancer, mais on ne peut ignorer que nous sommes dans le dur. Je ne sais pas si le Père Noël est une ordure, mais sa hotte fond comme la banquise au Pôle Nord.

Dans les deux cas, il y a urgence.

3 commentaires:

  1. Et comment, qu'il y a urgence ! Il est bien élevé, ton Loulou, bravo.

    Bises.
    L'oiseau

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  2. et si tu n'attendais pas pôle -emploi pour te trouver du boulot , je pense qu'ils sont débordés et bientôt c'est toi qui seras débordée ..par le manque d'argent ;alors ,je me répète un peu steph ,mais action réaction ... d'accord ,laisse passer les fêtes mais n'attends pas 3 mois ,car il va y avoir ...urgence
    Je t'embrasse très fort JOL

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  3. @ l'oiseau: Bien élevé? Tiens, évidemment!

    @ Jol: oh, je n'attends pas que Pôle Emploi me trouve un job, je sais bien que je sors des cases et qu'ils ont d'autres chats à fouetter. D'ailleurs, le portefeuille de 90 à 95 demandeurs d'emploi est très sous-estimé par rapport à la réalité, m'a raconté un ami, salarié de Pôle Emploi, ce week-end. C'est plus du 150 personnes qu'un conseiller doit gérer...

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