jeudi 10 mars 2016

Ceci n'est pas un poisson d'avril (prologue)

Le 1er avril, je vous dévoilerai tout.
 
Je sais, rien que la date prête à la confusion, Loulou m'ayant nonchalamment fait remarquer que c'était le jour des poissons d'avril. Et pourtant, je n'ai jamais été aussi sérieuse (enfin, presque. Je me souviens avec nostalgie de mes journées passées dans les hémicycles, où j'aurais pu tracer la ride du lion qui se creusait au fil des heures sur mon front, à écouter au premier degré ces politiciens, sans penser alors que j'assistais en fait à un pestacle de clowns) (naïve que j'étais) (Bref).
 
Petit, gros indice, même, je crée ma micro-entreprise, laquelle sera donc officielle ce 1er avril. Pour le nom et les détails, vous me permettrez de vous faire patienter, que dis-je, languir. Bon, j'admets que la présentation d'un specimen physiquement intelligent pourrait vous permettre de me faire parler davantage.
 
Vous avez ça en stock?
 
Non?
 
Bon, donc vous attendrez le 1er avril.
 
Mais je vous promets qu'il y a du lourd.
 
Et voilà que la mouette s'emballe encore... Ou pas. Disons que je faisais moins la maligne en début de semaine. Engluée dans une angoisse primaire liée à un statut précaire, perdue dans un désœuvrement sans fin, je me suis fait quelques films. Mais flippants, les films. Du genre, "madame, tu vas aller vivre bientôt sous les ponts, mais réjouis-toi, le printemps arrive, tu ne mourras pas d'engelures...
 
Juste de faim."
 
Tentant de surpasser ces idées un rien funestes, je suis partie à la chasse aux opportunités, persuadée que cette débauche d'énergie me permettrait de voir le jour, là, pas loin. C'est alors que j'ai frôlé le double homicide en envisageant l'étranglement radical d'une dame-de-la-banque-moraliste, et d'une non moins radicale pendaison (de moi-même.)
 
Vous voyez le genre.
 
Pourtant, contre toute-attente, mon moral, alors passé sous les -70° (au moment de la pendaison envisagée, je crois) est remonté en flèche pour m'offrir un pseudo-état de sérénité, propice à avancer.
 
A la faveur d'une rencontre majeure, me voilà sur tous les fronts, à aller chercher du devis, cibler mes futurs clients, contacter les fournisseurs, prévoir le plan de financement...
 
J'en oublierai presque que ce 1er avril correspond aussi... à ma fin de droits. Sacrée coïncidence, n' est-ce pas?

J'ai perçu une certaine ironie du sort, ce soir, en passant, sans l'avoir prévu, devant le restaurant que j'ai quitté voilà près de deux semaines maintenant. Quelle opportunité, finalement, d'avoir pu fermer cette porte-là, pour en ouvrir une autre qui, malgré les angoisses et autres envies de meurtre (!) passagères, m'offre un chemin unique.

Un chemin à la fois inconnu et familier, une voie improbable et réjouissante que je construis chaque jour à mon échelle. Et qui verra ses premiers fruits au 1er avril...

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