lundi 27 juillet 2009

Double vie

22 heures. Ouf. Je soupire, je me pose sur le canapé et je m'octroie une pause. Un peu de temps pour moi, à faire ce que bon me semble. J'avais un peu oublié cette sensation, après trois semaines de vie solo.

Mon fils est de retour et je me surprends à devoir reprendre mes marques. Cet être si cher, que je connais mieux que quiconque, est à la maison comme si de rien n'était et moi, je reprends mes vieux automatismes.

Lui d'abord.

J'entends les deux du fond qui, déjà, bondissent. Non, je ne veux pas faire de mon loulou un enfant-roi. Il sait que nous ne sommes pas copains. Simplement, j'endosse de nouveau le rôle de maman et j'en oublie mon identité propre, celle d'une femme. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut vraiment décider, c'est lié à l'histoire personnelle de chacun, à la relation que l'on a développé avec son enfant. Et à ses envies, aussi, je crois.

Oui, cela me fait du bien d'être présente pour lui. Oui, je m'oublie un peu. J'ai mes raisons. Je n'ai pas encore vraiment combiné de façon égale mes deux statuts - mère et femme, oh, vous suivez ou quoi ? - mais au fond, je suis persuadée qu'il y a un temps pour tout. J'ai besoin qu'il grandisse, j'ai envie de me réaliser professionnellement, d'abord, pour allier peut-être plus tard tous les aspects d'une vie de femme "lambda".

Pourquoi je parle de cela? Tout simplement parce qu'il y a trois ans, en plein été, je l'embarquais dans cette nouvelle vie, celle des deux maisons. J'avais tellement de choses à gérer simultanément que je n'étais pas certaine de pouvoir tout mener de front. Trois ans plus tard, tout s'est aplani, je ne vois plus mon statut de mère célibataire comme un boulet au pied - même si j'aime à me traiter de cas soc', par provoc, sans doute.

Le seul aspect particulier, c'est ce retour à la vie normale, à chaque retrouvaille après quelques jours ou plus chez le papa. Après avoir goûté à la liberté d'une vie sans contraintes, je me repositionne systématiquement en maman-avant-tout. Au fond de moi, c'est comme une sorte de vide qui s'opère, d'un coup, l'envie de lâcher du lest, d'oublier un peu les batailles quotidiennes, pour se concentrer seulement sur lui. Mon fils. Comme si plus rien n'avait vraiment d'importance.

Alors, quitte à prendre un peu de recul, autant partir en vacances (tiens, la bonne excuse). Je vous abandonne donc un peu, pour une petite escapade. Je repasserai ici, probablement, dans les jours à venir mais quand, je ne pourrai vous le dire. Pas de connexion là où je suis - si, ça existe encore. Et donc, la liberté de vivre et d'humer l'air, tranquillement. Sereinement.

PS: Je vous parlais hier de la relativité des événements. Je ne savais pas encore que la Mite orange allait vivre, elle aussi, une terrible épreuve. Courage à toi, jolie mite...

dimanche 26 juillet 2009

Carpe Diem

"C'est pas grave", disais-je tout le temps lorsque j'étais enfant.

"C'est pas grave", disais-je encore tout à l'heure, à propos d'un petit désagrément familial.

"C'est pas grave" ai-je souvent pensé à propos des petits malheurs d'un jour.

Cela m'a valu de passer parfois pour une insouciante, voire une nonchalante. Du genre à balayer de la main les broutilles quotidiennes.

Cette façon de relativiser a toujours été, paradoxalement, contraire à mon anxiété naturelle. Mais voilà, j'avais beau me stresser pour un rien, je trouvais toujours un moment le moyen d'asséner "C'est pas grave."

Parce que c'est la vie, je continuerai à balancer du "c'est pas grave" à tout bout de champ. Peut-être avec plus de conviction, tant j'ai mesuré ce week-end à quel point nous sommes peu de choses. J'ai toujours su que la vie pouvait basculer en un instant et ce serait un cliché de rappeler que notre existence s'avère d'autant plus précieuse que l'on en saisit l'absurdité et la fragilité.

Et pourtant, quand une voix chevrotante vous annonce qu'un proche a frôlé la mort, qu'il s'en est fallu de peu pour qu'il quitte cette Terre, plein de rancoeur - mais aussi rempli d'amour - c'est comme une piqûre de rappel. Une façon de rappeler que nous ne sommes que mortels. Tonton Enzo, Tata Iz', les filles, je pense à vous. Le plus dur est passé.

Rappelons-nous juste une chose: il y a peu de choses graves. Mais n'oublions pas que celles qui le sont rendent la vie plus délectable encore. Alors, je sais, l'expression est galvaudée, mais si juste, pourtant. Carpe Diem.

vendredi 24 juillet 2009

S'extasier devant des éléphants

Vous allez penser que j'exagère mais entre deux tournées des banques, un redressage de dos-cassé-par-un-trampoline-Mickey et un passage à l'AFPA - ma deuxième maison, même si je ne suis plus censée y aller - je reprends ma valise que je n'avais même pas rangée, pour filer en week-end, ce soir... Hum, je pense qu'il y a moyen de rigoler et je ne manquerai pas de vous raconter ça, je pense, avant de repartir la semaine prochaine.

Quoi, quoi, quoi, un break??

Une relâche?

J'ai des circonstances atténuantes : Trois semaines sans mon loustic, ça me donne envie qu'on s'accorde un peu de temps tous les deux, et j'ai hâte d'être à dimanche soir pour voir sa petite frimousse (légèrement) dorée.

J'ai bien songé à partir une semaine en club avec lui, d'autant que les voyagistes pensent même aux "familles monoparentales" désormais, pragmatisme commercial du monde moderne, mais le devis que j'ai demandé hier m'a refroidie. 1500 euros à deux pour une semaine, all inclusive - certes- à Djerba, ça fait un peu chèros, à mon humble avis. Et encore, la dame, elle m'a bien dit de me dépêcher parce que, à ce prix-là, les places vont vite partir...

Alors, en attendant de dégoter THE affaire of the last minute, nous allons nous promener un peu sur la Côte Atlantique. L'essentiel étant de passer du temps ensemble, loin des prévisionnels, loin de cette quête au local, loin des garde-fous et du train-train.

Les vacances, en somme!

Pour ce week-end, le programme s'avère très musical avec le festival des trois éléphants à Laval. Un break en Mayenne, a priori, ça ne semble pas très glamour mais je trépigne déjà!

Y'a pas à dire, lorsque l'on ne représente plus rien socialement, lorsque l'on se bat pour tenter d'y remédier, on finit par se réjouir d'un rien... Même si, en l'occurrence, le rien est un week-end entre potes et ça, c'est sacré!

A très vite! Have fun...

jeudi 23 juillet 2009

Banco & haro

En me couchant hier soir, je savais déjà à quoi m'attendre dès le lever: une journée marathon. Je m'étais calée des rendez-vous, genre de ceux qui plombent. Le résultat ne s'est pas fait attendre.
8h - Ah, j'oubliais, ma barre de métal est toujours solidement accrochée à mon dos. Une petite roulade sur le côté et hop, ni vu ni connu, je suis debout. Je songe au bonheur de ces gens qui se lèvent comme ça, sans douleur. Je me sens vieille.

8h30- J'ai mal au ventre. J'ai eu le malheur de songer à ce qui m'attendait et je flippe. J'ai l'impression d'avoir quatre ans, mais dans le corps d'une vieille personne.

8h50 - je dois filer dans quelques minutes et je suis rivée sur l'écran de mon ordi, toujours en tenue légère. Faudra que je songe à me greffer un minuteur dans la tête. Et un cerveau, aussi.

9h15- Je suis vraiment ravie d'avoir pris mon vélo pour cette matinée. Il fait -12 et il pleuviote. C'est pas comme si on était en plein mois de juillet, cela dit.

9h34- Je suis en retard à mon rendez-vous, décoiffée (me suis-je coiffée? Ah non, c'est ça) et en nage. L'effet du vélo.

9h35 - Premier sursis de la journée, Christiane, qui m'a déjà suivie dans mon projet, a accepté de reprendre le dossier. Voilà une personne sympa et compétente, sans apriori. A peine croyable.

10h30 - Elle me suggère de faire un EMT. Pour moi, c'était une matière qui nous permettait de glandouiller au collège, à faire du macramé, des circuits électroniques ou des tartes au sucre.

10h31 - J'apprends que l'EMT est une évaluation en milieu du travail. En gros, je vais bosser à l'oeil pour un resto et le cuistot évalue si oui ou non je suis capable de tenir ma place. Banco, j'adore l'idée.

10h35- Je remplis mon petit cahier des tâches à accomplir. Christiane a une idée de resto où je pourrais aller m'évaluer. Et gagner en crédibilité auprès de tous ceux qui vont s'interroger sur mon manque d'expérience en restauration.

11h- Vite, je reprends mon vélo. Il ne pleut plus et je ne sais pas où ranger ma parka. Je file pas très loin, honorer l'un des rendez-vous qui me stresse aujourd'hui. La chargée de mission de cette asso m'a déjà fait passer un interrogatoire au téléphone, la veille, et je sens qu'elle va remettre ça.

11h02 - En même temps, c'est normal, cette asso propose des crédits à taux 0, à hauteur de 10, 15 ou 20000 euros, dans certains cas. Logique qu'elle se renseigne un peu, au préalable.

11h03 - J'ai mal au ventre.

11h04 - Elle arrive dans la pièce, silhouette menue, visage fin rehaussé par de grandes lunettes noires. La poignée de main est sèche, le sourire timide.

11h05- J'ai peur.

11h06 - Elle attaque. Le ton est donné, pour de simples questions administratives. Elle veut du net, du ferme, pas du blabla. On ne la lui fait pas, à elle.

11h07 - Je prends ma respiration et me lance. Je répète peu ou prou ce qu'elle a déjà lu dans mon gros livre rose. Elle passe à l'interrogatoire.

11h12- Elle aime les questions-piège. Elle prêche le faux. Je suis un peu perdue mais n'en fais rien voir, restant stoïque à ces assauts répétés.

11h30 - La chargée de mission m'apprend quelque chose: je n'ai pas d'expérience en restauration.

11h31 - Je suis soufflée. Je ne savais pas.

11h32- Je me dis qu'elle me prend vraiment pour une greluche. Mais je sais aussi qu'elle est un excellent garde-fou.

11h33 - Elle m'explique pourquoi son asso est devenue si frileuse à soutenir financièrement des projets comme les miens. Elle a ainsi deux cas de personnes, "pas dans la partie", qui se sont lancées et qui ont échoué.

11h34 - Je sais de qui elle parle. Je lui réponds que leur investissement majeur n'a rien à voir avec celui que je prévois. Que ces gens-là se sont collé beaucoup de pression en lâchant un maximum de moyens sur le local et la déco, au détriment de l'essentiel: l'accueil et l'assiette.

11h35 - A son sourire, je vois que je marque un point.

11h36 - Je reste vigilante, elle est à l'affût de la moindre de mes failles.

11h40- C'est horrible, j'ai envie de bâiller. Elle me parle, yeux dans les yeux, et moi je dois contenir cette irrépressible envie.

11h41- Je me maudis de m'être couchée si tard. Je décide que 2 ou 3 heures du mat' est un créneau réservé pour 1/ les jeunes ; 2/ les vacanciers; 3/ les retraités qui n'auraient pas mal au dos; 4/ les insomniaques; 5/ les débiles comme moi qui retardent le moment d'aller se coucher pour passer la soirée derrière l'écran - quel qu'il soit d'ailleurs.

11h42 - J'opte pour l'ingénieuse idée de sortir de la catégorie des débiles. Je ne me fais pas d'illusion pour réintégrer celle des jeunes.

12h50- Il aura fallu un peu de temps mais la chargée de mission s'est déridée. Elle parle un peu moins au conditionnel. Elle évoque ses préférences culinaires, sa passion pour le calcul des calories et le contrôle de son alimentation.

12h51 - Pour moi qui me suis replongée dans cette drôle de période anorexique, j'avoue que sa rigueur alimentaire m'effraie un peu.

12h52 - Je sais maintenant qu'elle mange des soupes lyophilisées et qu'elle a une fille qui aime les frites, et qui ne comprend pas que sa mère ne se serve pas de la friteuse.

13h10 - La poignée de main est toujours aussi ferme mais le sourire plus large. Je vais revoir cette chargée de mission.

14h- Je surfe sur Internet. Vais sur le blog de Café Clochette, qui explique pourquoi elle n'a pas revu ses prix, après la baisse de tévéha. Elle évoque les temps difficiles.

14h01- Ça fait peur.

14h40 - Avachie sur mon canapé, je soupire. J'ai maintenant rendez-vous avec la banque. La personne que je vais voir est celle que j'ai rencontrée lors du jury afpaien, la semaine passée. Au moins, elle connaît le dossier.

14h41 - J'ai mal au ventre.

14h47 - J'enfourche mon vélo. Je sais que c'est une connerie, à voir le nuage menaçant au-dessus de ma tête déjà farcie.

15h- Je rentre dans son bureau. Je suis bluffée par son aplomb. Elle a quoi? 30 ans ? Et encore, grand maximum, j'en suis persuadée. Pour autant, elle débite son discours avec maîtrise.

15h05- Après examen des deux prévisionnels, l'un pour le petit local que je convoite depuis si (trop?) longtemps et l'autre pour ce lieu que j'ai visité la semaine passée, elle ne fait pas de détail. Banco pour le petit lieu. Haro sur l'autre.

15h06 - Je ne suis même pas surprise.

15h30- Elle me parle d'EBE, de CAF et d'amortissements et je hoche la tête. Si on m'avait dit ça il y a quelques semaines, j'aurais bien rigolé. Là, ça me parle.

15h31- Je sais maintenant que, pour faire passer un dossier, il faut en présenter un plus gros, qui semble déraisonnable et faire genre, non, mais j'ai bien compris que c'était trop conséquent, mieux vaut commencer modestement, blablabla.

15h32- Elle n'est pas stupide, mais de toute façon, les chiffres parlent pour moi. Ça passe.

15h33 - Elle m'apprend quelque chose: je n'ai pas d'expérience en restauration.

15h34 - Je suis soufflée. Comme une impression de déjà-vu.

15h35- Je me dis qu'elles me prennent vraiment toutes pour une greluche. Mais que c'est de bonne guerre.

15h36 - Elle m'explique pourquoi les banques sont devenues si frileuses à soutenir financièrement des projets comme les miens.

15h37- Je m'attends à ce qu'elle évoque le cas de personnes "pas dans la partie" qui ont échoué.

15h38 - Au lieu de ça, elle finit sa phrase, en précisant: "mais je vois que vous avez vraiment envie de monter cette affaire, et je ne peux pas l'ignorer."

15h40- Elle sourit. Et marque un point.

15h50 - Elle fait une synthèse du dossier, après avoir joué de la calculette, évalué les prêts, les aides... Et me conseille de n'avoir "aucune pitié" pour la propriétaire actuelle du resto convoité, eu égard à son chiffre d'affaires riquiqui. Que ce bilan joue en ma défaveur et que je dois retourner la situation et prouver que je peux faire mieux que ça. Que je dois négocier sec.

15h51- Comment on fait, pour devenir un vrai renard en deux coups de cuillère à pot?

15h52 - Un éclair de lucidité : On pense à sa survie.

16h - Au moment où je sors de la banque, j'ai à peine le temps d'enfiler ma parka qu'il se met à pleuvoir. Mais du genre pluie de cinéma, comme lorsqu'on a l'impression que les acteurs se prennent des seaux d'eau sur la tronche pour mimer les averses.

16h02 - Je suis trempée. Il est temps de m'octroyer une petite pause. Enfin, pas là, maintenant que le gros 4x4 vient de m'éclabousser les 2cm encore secs de mon jean, mais une fois au chaud.

16h10 - Je retrouve une amie dans le seul salon de thé que j'avais négligé, au moment de mon étude de marché. Le gérant a deux de tension, prévient sur sa carte que les gens pressés n'ont pas leur place ici et se décide à prendre notre commande une bonne vingtaine de minutes après notre arrivée.

16h25- Les smoothies qu'il nous a apportés ne sont pas faits maison. Petite déception. Mais l'endroit est tellement beau - et le jus plutôt savoureux - qu'on ne lui en tient pas rigueur.

17h25 - Nous sommes une petite dizaine de clientes et le salon de thé est blindé. Personne ne bouge, sinon pour s'enfoncer davantage dans les fauteuils club. Je m'interroge alors sur la rentabilité d'une telle affaire, surtout située en plein centre du Mans, avec un loyer du coup conséquent.

17h26 - Un coup d'oeil au gérant à deux de tension me rassure sur son état de stress. Visiblement, ça ne l'atteint pas.

17h50 - Au moment de partir, il avoue à mon amie que c'est la première fois qu'il accueille autant de monde à la fois dans une après-midi. A même pas 3 euros le panier moyen, je me pose quand même des questions. Déformation...

17h52- Ma parka s'emmêle dans ma roue. Du cambouis partout. Il est temps que je rentre.

19h - J'appelle mes parents pour prendre des nouvelles. Mon cher papa me serine, une fois encore, que ça licencie à tour de bras et que les affaires coulent. Avant d'ajouter que la restauration, c'est du travail, hein.

19h01 - C'est marrant, parce que, pour quelqu'un au chômage, j'ai rarement autant bossé en cette période de juillet. Mais bon, je ne peux pas lui en vouloir: c'est encore un garde-fou, j'imagine, pour le cas où je m'enflammerais...

mercredi 22 juillet 2009

Peut-on manger de la mouette et autres histoires

Peut-on manger de la mouette? Personnellement, je ne vous le conseillerais pas. Une chair tendre, certes, mais sous une sacrée carapace, un dos trop raide pour être savouré - après quelques absurdes sauts de trampoline au club Mickey - la bête est coriace. Donc, soyez gentils, épargnez-moi.

Je n'ai pas fumé, je vous rassure, je suis même dans un état normal, malgré la projection d'un film que j'ai plutôt détesté -"j'ai tué ma mère" - mais je m'amuse follement avec ces expressions-clé qui guident quelques inconnus ici. Il y a donc quelqu'un sur cette terre qui veut savoir si on peut manger de la mouette. Soit.

Il y en a un aussi qui cherche du "rose avec un crane" (sans accent, c'est mieux), un autre encore en quête d'un "taureau en maori", une maman, sans doute qui voulait "un billet pour jouer à la marchande", une fille au régime s'interrogeant sur la méthode "reset chocolat", un curieux qui tentait de percer le mystère sur "la mouette meetic" et enfin, une âme naïve interpellant les internautes d'un "avez-vous déjà eu affaire à un homme méchant?"

Aujourd'hui, j'ai eu affaire à deux hommes, non pas méchants, loin de là, mais qui m'ont interpellée. Ah oui, j'oubliais de vous préciser que je m'octroyais une journée AFPA, non par nostalgie, mais pour fignoler un prévisionnel digne de ce nom - j'ai rendez-vous à la banque demain.

Le premier, bon gros nounous, parle avec émotion de son business. Il évoque les forfaits "tendresse" qu'il souhaite proposer à ses clients, avec des soirées spécial Saint-Valentin (hum, tout ce que j'aime...) et autres mièvreries commerciales (le premier qui ose me balancer que je suis blasée, je le sors). Tout ça est très joli, pavé de bonnes intentions.

Et puis, il se met à me parler de ses quatre enfants, "nés de deux mariages ratés". De sa rémunération, qu'il souhaite la plus basse possible, "comme ça, ce sera la CAF qui paiera la pension alimentaire, elles ne me ponctionneront pas MON argent."

...

Je suis outrée. J'essaie de prendre sur moi en me disant que ce garçon ne peut pas être un mauvais bougre, il a l'air si gentiiiiiiil... Il remarque mon air atterré, il se justifie:

"- ben c'est vrai, quoi, si je leur donne 120 euros par enfant, elles s'en servent pour elles. L'autre jour, y'en a une qui a osé me réclamer une paire de baskets, en plus!"

Je ne dois pas juger. Je ne connais pas les femmes en question. Ce sont peut-être des harpies, du genre très vénal. Il le dit, d'ailleurs:

"-la dernière, elle m'a quittée dès qu'elle a vu que je n'avais plus de fric."

Oui, mais monsieur, là, pendant que tu vas rouler dans ta limo - il m'a montré sa courbe sur trois ans. Ah la la, c'est impressionnant, le fric qu'il va rentrer - la CAF devra aller cracher pour les mamans de TES enfants. Je ne sais pas pourquoi, mais je me suis replongée dans mes chiffres, finalement, ça m'écoeurait moins.

Le deuxième, il fait genre un peu cow-boy. Le rebelle, petite barbe mal taillée, la tête à cracher "fuck you" à la terre entière. Et puis, il me montre ce qu'il a envie de développer. Des petits poissons qui viendraient débarrasser nos petons de leurs peaux mortes. Il évoque beaucoup l'aspect financier, affiche ses ambitions de grandeur et pourtant, à l'écouter, j'entends de la passion, de l'investissement, du travail. Le cow-boy veut, à terme, soigner les gens.

Le gentil enfoiré et le cow-boy tendre, ou comment se méfier des apparences. J'adore creuser un peu.

EDIT: Ces deux hommes en question sont des stagiaires de l'AFPA, futurs créateurs d'entreprise. Et pour les expressions-clé, il s'agit des mots que les gens tapent sur Google et qui les envoient direct ici. C'est mon petit logiciel de stats qui me l'indique...

mardi 21 juillet 2009

Drôles d'histoires en cuisine, part three

Je dois rester sur mes gardes, car mes parents commencent à me surveiller. Je jette discrètement la viande - à la poubelle, dans l'espace vert à côté de la maison - et range les épluchures de carottes dans un sac en plastique, le temps de m'en débarrasser. Je dis à mon père que je n'ai pas le temps de finir de manger, le midi, que je dois réviser mon bac. Il a confiance. Je monte dans ma chambre et m'installe sur mon lit, une bonne BD à la main, ignorant le temps qui passe. Je ne peux pas me concentrer sur mes cours, je ne pense qu'au nombre de calories que j'ai pu ingérer. Je suis énervée, aussi. Je bois du café par litres.

Je n'ai plus de tonus mais je me crois forte. En cours, je suis bonne élève et ignore les réflexions. Seule petite contrariété, une autre que moi, dans la classe, semble vivre une expérience similaire. Elle s'appelle Isabelle, a les joues creusées et le regard un rien absent, et je suis jalouse, tant ses mains fines et cadavériques me font concurrence.

Je devrais pourtant me satisfaire de certaines paroles, qui me laissent entendre que, moi aussi, je suis mince. Dans la glace, pourtant, rien à faire. Je suis toujours grosse. Je pèse 44kg.

Ma soeur, lassée de tout ce cirque, me prend un jour à parti devant toutes les copines du basket. Elle m'appelle d'un nom de camp de concentration, que je citerai pas. Elle ne cache pas son dégoût pour mes côtes apparentes, pour mon buste si menu qu'il semble prêt à s'affaisser à la moindre secousse. Son emportement est d'une violence inouïe. Je regarde les filles, témoins de la scène. Elles baissent les yeux. Grand moment de solitude. Elles ne comprennent donc pas?

Au réveillon du premier de l'An, je saisis de nouveau l'intensité de ce regard apeuré. C'est la famille d'une amie très chère qui m'observe ainsi, m'implorant de me réveiller, de sortir de ce monde dans lequel je me suis enfermée toute seule.

Je ne sais pas alors de quoi ils parlent, mais le regard des autres, c'est ce qui, je crois, m'a le plus marquée tout au long de cette période d'anorexie.

Je n'ai jamais su identifier la nature du mal, lorsque j'étais plongée dedans, et je n'en ai compris les terribles rouages que des années plus tard. J'ignorais alors (ou voulais-je l'ignorer?) que je mettais ma vie en danger. Je pensais simplement à perdre un peu de poids. Je n'imaginais pas tomber dans une telle spirale. A l'époque, je n'ai consulté aucun psy, parce que cela ne se faisait pas, dans ma famille. On pensait sans doute que taire la maladie aurait le don de l'éteindre.

Avec le recul, j'en ai voulu, surtout au deuxième médecin, un grand type tout sec dénué de tout sentiment, qui a également réalisé son travail de sape sur l'amie très chère que j'évoque plus haut. A 14 ans, on est très influençable et ce regard masculin fait très, très mal. Je parlais de l'influence des médias mais à vrai dire, je n'y crois pas trop. Le mal est plus profond, moins vain. C'est une façon d'exister, de s'opposer à sa mère - cela a été mon cas - et si je ne prétends pas tout connaître de cette terrible maladie, si je ne souhaite pas généraliser, je suis persuadée qu'il y a une sacrée différence entre les ados sensibilisées par les silhouettes sveltes qu'elles découvrent dans les magazines et les autres, dont le mal-être est latent et qui trouvent via le contrôle de l'alimentation une façon de s'engouffrer dans une faille, sans penser qu'elles sont à la fois victimes et bourreaux de leur propre corps.

J'ai mis du temps, beaucoup, à en sortir et j'ai même passé quelques temps sans toucher à une casserole, fuyant la cuisine et tout ce que cela pouvait représenter.

Mais je sais aujourd'hui que la cuisine peut simplement être le lieu du partage, du plaisir, de la convivialité. Je n'aime toujours pas le porc, mais j'ai vaincu peu à peu mes réticences. Simplement, l'idée même d'envisager un régime me révulse. Certains parleraient de manque de volonté. J'évoquerai, en connaissance de cause, une simple question de survie.

lundi 20 juillet 2009

Drôles d'histoires en cuisine, part two

Elles me regardent bizarrement. Un peu apeurées, je le sens bien. J'ai 17 ans et mes copines de lycée, que j'ai quittées trois mois plus tôt, ont du mal à me reconnaître. Mes joues ont fondu, mes salières sont très marquées, je fais du 34 et je ne suis plus moi-même.

J'ai pourtant passé l'été à me concentrer sur mon cas.

Ma mère m'a amené chez une gynéco, pour tenter de me faire passer un message. Je me plains de mes bras maigres, et la spécialiste me dit que j'ai le droit de m'octroyer une pomme au goûter, si j'ai faim. Mais je ne peux plus. J'en mange déjà une à chaque repas et je ne peux pas me permettre d'en avaler une quatrième dans la journée, elle ne comprend donc pas?

Elle me dit aussi que je suis en pleine croissance, que je suis libre de manger à ma faim. Mais que sait-elle, de la faim? Que sait-elle de la jubilation intérieure que l'on ressent lorsque l'on se réveille le matin, légère de pas avoir craqué? Que sait-elle du mépris que l'on nourrit pour ces êtres si vils qui mangent sans privation? Que sait-elle du contrôle, justement?

Je crois être maître de moi-même. J'ai l'impression d'être plus forte que les autres. Je me sens supérieure, presque intouchable. En lévitation, au-dessus du monde matériel. Plus rien ne m'atteint. J'ignore que la maladie me contrôle et s'est emparée de mon esprit. Et que je suis de plus en plus vulnérable.

Cet été, je me suis éloignée de mes parents. Deux mois à jouer la baby-sitter pour un enfant de quatre ans - le neveu d'une amie, chez qui je suis logée, nourrie (enfin, si j'avais voulu), blanchie. Deux mois à diminuer toujours plus les rations, à me contenter de tomates, yaourts et pommes, à assumer le regard inquiet de la grand-mère de mon amie, qui m'assène qu'il mieux vaut faire envie que pitié et que ce serait bien que je fasse un peu envie. Deux mois à courir sur la plage, deux tomates volées chez la grand-mère dans le ventre, avec l'impression de trouver encore des ressources, alors que je suis simplement en train de me décharner chaque jour un peu plus. Deux mois à ruser, à déguster l'air nonchalant une glace chez Rose Nanane, délicieux glacier baulois, avant de m'épuiser sur le sable pour éliminer.

Je trouve toujours des prétextes. J'ai besoin de courir car je dois suivre à la lettre le programme de mise en forme fourni par mon nouveau club de basket, dont les ambitions sont réelles. Je n'ai pas le temps de manger car l'enfant dont j'ai la charge a besoin de moi. J'ai mangé trop de framboises du jardin, vous comprenez, ça m'a coupé l'appétit. Personne n'est dupe. Le père de mon amie est psychiatre. Sa mère pharmacien. On me laisse faire. Au fond de moi, j'ai envie de voir jusqu'où je dois aller pour susciter une réaction. Et puis, je n'ai pas fini de maigrir, je me trouve toujours trop grosse. Je pèse 46 kg.

Lorsque mes parents viennent me chercher, après ces deux mois, je lis la stupeur dans leur regard. Ils n'osent rien dire, comme s'ils avaient peur que je supprime une pomme supplémentaire de ma ration quotidienne. Mais ils n'en pensent pas moins. Comme mes copines du lycée, qui se demandent où leur joviale camarade a bien pu passer... Je mé réjouis de pouvoir mettre toutes les fringues dont j'ai envie. Je sens bien, ça et là, quelques défaillances, mon corps qui ne répond plus, les règles perdues, la peau blanche et surtout l'impression de ne plus faire partie du même monde, d'être sans cesse ailleurs. Mais ce qui compte encore, à mes yeux, c'est de raboter encore ces courbes que je crois deviner.

A suivre...

dimanche 19 juillet 2009

Drôles d'histoires en cuisine, part one

Je vous parlais hier des expressions-clé qu'ont utilisées les internautes pour arriver sur ce blog. Bingo, ce matin, s'affichait un bien énorme: "brouette des picsous."

J'adore.

Je pourrais même disserter sur le thème des picsous, car j'ai eu hélas l'occasion d'en côtoyer. Mais j'ai préféré rebondir sur le dernier commentaire d'Anne, qui se dit "un cas culinaire". Du genre le boulet qui n'aime rien et qui désespère les cuisinières.

Eh bien, non, Anne, tu n'es pas seule. Ce n'est pas un hasard si je veux me lancer dans la restauration. Et j'ai bien même envie d'y consacrer un p'tit feuilleton, tiens, avec des épisodes que je vais planifier sur plusieurs jours -car je pars ce lundi, deux jours à la mer, avant de revenir aux choses sérieuses. Allez, c'est parti? C'est parti!



Il me touche les cuisses. Il me trouve "grassouillette". J'ai 12 ans et envie de tuer ce médecin si délicat. Avec mes grosses joues, c'est sûr que l'on ne peut pas me classer dans la catégorie filiforme. Ma mère a toujours tenté de me rassurer. "Mieux vaut faire envie que pitié." L'horreur.

Les mercredis suivants, je me fais un malin plaisir de préparer des pommes au four, l'après-midi, avant de filer à l'entraînement de basket. Je découpe dans les magazines les recettes et j'en ai l'eau à la bouche. Ma mère n'est pas fan de cuisine et elle me cède volontiers les commandes.

Il me fixe de haut en bas. Je pèse 57kg. D'un ton condescendant, il m'assène un coup de poing fatal: "ce serait pas mal que tu perdes un peu de poids." J'ai 14 ans et envie d'anéantir ce médecin - pas le même, on a changé entre-temps. Avec mes bonnes cuisses, je ne rentre pas dans les jeans moulants de l'époque. Ma mère me dit de ne pas l'écouter. Je viens de passer six mois plâtrée, entre fracture, entorse et cie et c'est vrai, je suis un peu plus grosse que mes copines. Maman dit que ma croissance n'est pas finie, que les choses vont changer et que quand même, je ne suis pas difforme. Et puis, mieux vaut faire envie... Ok, j'ai compris.

Au goûter, j'ai arrêté le nutella et me contente d'une pomme verte, regardant avec envie ma soeur toute fine s'envoyer un paquet de petit Lu sans sourciller. Je ne dis rien, mais je commence à réduire les doses. Nous partons en vacances, avec l'une de mes amies au comportement alimentaire douteux. Nous nous motivons toutes les deux. Au début, je parle à ma mère de cette volonté de suivre un "régime". Elle hausse les sourcils, pense que je ne vais pas tenir et s'en persuade d'autant plus lorsque, après un malaise, je reprends mes vieilles habitudes: la baguette de nutella sur la plage, au goûter.

A la rentrée, je me suis affinée, car j'ai grandi d'une dizaine de centimètres. Pourtant, l'idée de perdre du poids a vraiment fait du chemin chez moi. Peut-être est-ce une volonté de capter l'attention de ma mère? Ou pour suivre le modèle véhiculé partout dans les médias? J'ai quinze ans et je veux être mince. A partir de là, je vais tout faire pour.

Cela commence par la sauce, que je ne veux plus mettre sur la salade. Sur la viande, que je découpe en tout petits morceaux. Aux gâteaux que je refuse désormais. Dans ma tête, c'est une calculette à la calorie. Je sais que si je prends plus de trois bouchées de petits pois, je serais contrainte de prolonger ma séance de corde à sauter. Je ne me sens apaisée que lorsque je la repose, tremblante, en sueur.

J'ai faim, souvent. Pour maîtriser cette horrible sensation, je fais une consommation effrénée de granny- ce qui me vaudra ce surnom de "pomme verte", attribué par le frère moqueur d'une amie - et de carottes, que je planque dans le tiroir de mon bureau. Un soir d'été, alors que mes parents discutent avec des voisins, je craque et file dévorer des sablés dans le placard-piège. Je me sens sale. Je bois sept litres d'eau d'affilée pour me purifier. J'ai horriblement mal au ventre, ensuite, mais je pense que la graisse va être annihilée par cette arrivée massive d'un élément magique- l'eau.

A table, je me fixe des challenges intérieurs. Je trie de plus en plus, élimine chaque jour un aliment supplémentaire. Désormais, je déteste le veau, le porc, le beurre, la charcuterie... Mes parents font l'autruche et rentrent dans mon jeu. Je me mets à cuisiner pour eux, des plats plus riches les uns que les autres, et je les regarde avec dégoût, je vois leur bouche s'approcher de cette nourriture que j'assimile à du poison pendant que ma tomate et mon demi-oeuf me contemplent, dans mon assiette.

Paradoxalement, malgré mon dégoût pour elle, je suis obsédée par la bouffe et je passe mon temps libre à sélectionner de nouvelles recettes. Je suis malade mais je l'ignore encore.

A suivre...

La formation des sables mouvants

Je ne sais pas trop qui vient sur ce blog, à vrai dire. Il y a bien sûr les amis - ceux de la vraie vie et ceux de Facebook - ma soeur, mon cousin Jérôme, mes deux commentateurs fidèles, l'oiseau et Anne, plus quelques âmes égarées.

Comment atterrissent ces dernières ici? Eh bien, si j'en crois les stats et les mots-clé que le logiciel référence, il y a pas mal de fans des Bronzés et de filles en général. Je me souviens entre autres de plusieurs "fonce, sur un malentendu, ça peut marcher"; de "viedemerde.com", parfois décliné avec un "spécial filles". J'ai pu lire également un "fille nue" (j'imagine la déception de celui qui avait tapé ça sur Google), quelques "formation cuisine AFPA", deux-trois "une mouette qui cuisine". ..

... Et même "formation des sables mouvants", assez incongru mais plutôt proche de ma réalité, finalement.

Pourquoi je vous raconte ça ? Peut-être parce que la vie me semble si positive en ce moment que ça va finir par devenir très niais de palabrer sur ce quotidien rose bonbon. Et puis, après tout, je fais ce que je veux, c'est mon espace ici!

Petit bonus, après la merveilleuse vidéo de la jardinière de légumes, avec les carottes qui filent avec leurs petites papattes dans la casserole, une charlotte aux fraises bien rock and roll qui vous mettra en appétit... Je vous laisse savourer!

samedi 18 juillet 2009

Tout le monde il est gentil

Y'a des matins comme ça où on se lève et où l'on commence par râler contre le réveil, les pigeons qui squattent le rebord de la fenêtre, contre le boulevard décidément trop bruyant ou le débile qui s'acharne sur l'interphone. Où l'on se prend les pieds dans un sac qui traîne, on ne sait pourquoi. Avant de se brûler sous la douche et de faire trop infuser le thé.

Et puis, dans la vie idéale, on se réveille comme une fleur, pleine d'énergie, lentement et dans le calme. Avec cette douce sensation que la journée va être douce et riche. On sait d'emblée comment on va s'habiller. La tenue tombe parfaitement.

Je ne vais pas mentir, mon quotidien me permet régulièrement d'assouvir ma soif de complaintes. Je hais les pigeons et les débiles de l'interphone.

Mais aujourd'hui, ça ressemblait à la vie idéale.

Déjà, le réveil. J'aurais dû le voir comme un ennemi, cet appareil au cri strident, qui me torture trop souvent - et d'autant plus avec six heures de sommeil au compteur. Eh bien, même pas. Trop envie de rayer la liste de mes tâches aujourd'hui. Limite si je ne l'aurais pas embrassé de me sortir de ma torpeur.

Ensuite, la balance, qui m'annonce un délestage, certes mineur, mais un délestage quand même. Bien.

Un p'tit coup d'oeil sur le blog. Trois commentaires. Mes trois fidèles commentateurs, gentils et avisés (non, je ne suis pas démago, j'apprécie, nuance) qui répondent ainsi à mon exercice du pour et du contre, sujet qui m'a tenu éveillée longtemps la nuit passée.

L'amie, qui m'appelle pour m'annoncer que l'on part deux jours à la mer la semaine prochaine.

Le message sympa qui suit, de nos hôtes.

Les parents, qui ouvrent grand leurs portes pour les vacances. Le papa, qui estime que le resto que j'ai toujours convoité serait décidément la meilleure option. Pour quelqu'un qui ne voulait pas entendre parler d'un tel projet il y a peu, on peut parler d'une sacrée évolution.

La banque, où la conseillère ne s'est même pas attardée sur le prix du gaz, préférant jouer de la calculette et me laisser entendre que j'aurai son aval.

Le formateur de l'AFPA, qui m'écrit que "c'est bien normal" de m'accorder du temps pour discuter, sachant que le stage est achevé, quand même, et qu'il est surbooké. Son assistante qui me demande des nouvelles, précisant qu'elle a "hâte d'en savoir plus".

La chargée de mission d'une autre asso, qui m'avait énormément soutenue, à qui je veux simplement déposer mon gros livre rose, sans la déranger. Au lieu de cela, elle tient à me recevoir, afin de faire le point, et me donne un énorme catalogue de matériel de cuisine pro. Elle me propose de m'aider à trouver les différents financements. Alors que je lui dis au revoir, elle me regarde, l'oeil pétillant, sourit et jubile : "On va finir par l'avoir, ce local!"

L'ostéo qui me dévisse la tête et me débarrasse enfin de mon balai, élément devenu tellement familier que j'ai eu la sensation de perdre un bout de moi-même. Sans regret, je précise.

Les amis qui appellent pour prendre des nouvelles ou pour m'offrir le thé, que je vois déjà rougir et protester, eux qui prennent le temps de passer sur ce blog.

L'autre amie qui m'invite au ciné...

Je me suis sentie vernie, sincèrement. Je suis tellement spécialiste de viedemerde.com, habituellement, que tant de gentillesse me surprend. Je savoure. Le pompon, c'était en rentrant chez moi. A la porte, un petit sac accroché. A l'intérieur, des petites bombes caloriques, bien alignées dans leur boîte, que le papa de mon fils a pris soin de déposer, comme ça, sans calcul, sans retour.

Alors, certes, ces klougs vont rendre ma balance bien moins complaisante. Certes, vous allez me prendre pour un coeur chamallow. Certes, je me prendrai certainement de nouveau les pieds dans le tapis dès demain matin.

Mais qu'est-ce que c'est bon de penser que, parfois, la vie peut sourire...

vendredi 17 juillet 2009

Girouette!

Dans mon esprit manichéen, le monde se divise en deux: les rabat-joie d'un côté, les optimistes de l'autre. J'avais donné, concernant la première catégorie, et j'avais logiquement besoin de l'autre pendant. Un peu de positif, trois fois rien.

J'ai donc rangé ma kalachnikov ce matin et suis partie à mon rendez-vous, direction l'agence immobilière, là où ces rabat-joie d'experts sont considérés comme des mauvaises herbes. Nathalie, frêle blonde souriante, m'accueille chaleureusement, d'une poignée de main ferme, et m'écoute. Comprend très vite mes besoins. Ne cherche pas à me fourguer un local à dix minutes du centre.

Du point de vue d'un optimiste, tout est possible.

Finalement, j'abandonne mon vélo pour la suivre dans les rues mancelles. Soudain, je me sens dans le secret des dieux. Là, c'est une histoire d'héritage qui a bloqué la vente. Ici, c'est le prix demandé qui était exorbitant. J'apprends que certaines enseignes, a priori florissantes, cherchent à céder. Je ne fais pas partie de la caste commerçante de la cité, mais je m'imprègne de ses mystères. Je jubile.

Nous arrivons au premier local. MON local.

Comment ça, je m'emballe? Ne soyez pas rabat-joie.

Le prix me va, le loyer aussi, reste juste un petit détail: pas de cuisine. Pas pratique, c'est vrai, pour un resto... Pour autant, ce n'est pas insoluble. Il "suffit" d'y installer une extraction et de respecter les normes sanitaires. Une paille. Je me projette complètement dans ce lieu, que je connais en tant que cliente.

Banco? Pas si vite. C'est un emplacement 1-bis, pas n°1. Comprenez qu'il y a moins de passage que sur la zone principale. Pour autant, la proximité d'avec la place principale me laisse des perspectives solides. Mon éternel optimisme, sans doute.

Deuxième local. Odeur pestilentielle dès que Nathalie ouvre la porte. Il y a une cave. La possibilité d'y trouver un cadavre n'est pas nulle. C'est moche, glauque, un rien excentré, je déteste. Fin du débat, le soleil du Portugal ne sera pas mien.

Vous allez penser que je change tout le temps d'avis - et je ne pourrai vous contredire. Mais la visite de ce local, véritable coup de coeur, m'a permis d'envisager de nouveau d'ouvrir mon p'tit resto, sans passer par la case marché. En bonne girouette, je sais que les rebondissements vont continuer de rendre mes journées palpitantes - et épuisantes, certes. Mais là, il y a tout ce que je recherche. Pas d'hésitation, j'ai pris rendez-vous à la banque et j'ai contacté toutes les asso afin d'obtenir un maximum d'appuis financiers.

"Hasard" de la journée, j'ai croisé la propriétaire du resto que je convoitais, à la Chambre de Commerce. Une petite discussion amicale plus tard, elle m'avouait que la situation était tendue pour elle et qu'elle allait devoir prendre une décision rapidement, afin de savoir si, oui ou non, elle continue de gérer ses deux restaurants. Elle a donc prévu de me contacter. Elle me l'a assuré d'un clin d'oeil.

Et je fais quoi, moi, si elle veut me le vendre, maintenant que j'ai trouvé un autre local? J'ai vu pires dilemmes, bien sûr, mais la vie nous offre parfois de drôles de surprises. Que même les optimistes n'osent pas envisager.

jeudi 16 juillet 2009

Non, ça ne sent pas le gaz

"Oh mais là, non, ce n'est pas possible, vous avez indiqué 200 euros pour le gaz, c'est trop peu, il faut surévaluer."

"Et puis là, vous avez écrit "non" au lieu de "mon", il faut tout corriger."

" Oh, et puis pareil, vous devriez remonter la note d'honoraires"

Et papati, et patata.

Il était 10 heures du matin et, bien que pacifiste dans l'âme, j'avais des envies de meurtre. Ma future victime trônait, en face de moi, entourant de son stylo la moindre des imperfections, avec un air sadique qui n'y trompe pas. Coupe courte, bouche pincée, regard vide.

Une experte-comptable. De la lignée des carrés. L'une de ces personnalités qui a envie d'entendre ce qu'elle veut, qui vous met le moral dans le caniveau si vous n'y prenez pas garde et qui, ensuite, se demande comment, enfin, c'est possible de se mettre aussi minable.

Greluche.

OK, rien ne sert d'insulter qui que ce soit, inutile de se prendre perpet' pour si peu, Dexter n'est pas disponible actuellement pour me dépanner et l'important n'est pas de savoir ce que l'autre pense, mais ce que l'on en retire. Soit. N'empêche que je suis tombée ce mercredi matin sur une expert-comptable de compet'.

Je l'imaginais déjà me poser les questions qui fâchent. Mais comment allez-vous faire, toute seule, pour tenir la salle et la cuisine? Et pour les ateliers avec les enfants? Et vous vous sentez d'attaque pour le coup de feu du midi? Et ma tête, elle vous revient? Et sinon, vous n'auriez pas quinze tonnes de cannelés à me refiler sous le manteau?

Mais non. Rien de tout ça. Juste: "oh mais quand même, 200 euros pour le gaz, c'est pas assez." Me voilà bien avancée, tiens.

Lors de cette ultime journée à l'AFPA, j'avais appréhendé le passage devant le jury comme un exercice enrichissant pour me faire les dents, avant d'aller présenter mon dossier dans la vraie vie. Au lieu de cela, je suis tombée sur un binôme féminin: jeune employée de banque trop discrète et experte-comptable, plus expérimentée, et surtout dominante. Le projet, ma personnalité, ce que je voulais apporter, elles semblaient s'en soucier autant que de leur premier pilonnage de client. Mais alors, question chiffres, des championnes. J'étais limite à me demander si je n'aurais pas dû coder mon business plan en lignes numériques. Pas facile à lire, a priori, mais pour elles, ç'aurait été du petit lait.

A un moment, j'ai perçu l'esquisse d'un sourire approbateur de l'experte-comptable. Un truc de fou. C'est le moment qu'a choisi sa comparse pour m'achever. "Mais votre chiffre d'affaires est trop petit par rapport à votre emprunt, une banque n'acceptera jamais."

Les doigts dans le nez, que je te fais un chiffre d'affaires à 300.000 euros toute seule comme une grande. En bossant non-stop de 8h à minuit tous les jours, en m'octroyant une pause quotidienne de cinq minutes.

Greluche.

Autant vous dire que mon impression était pour le moins mitigée, en ressortant, une bonne heure et demie plus tard. C'est en voyant Yvonic fulminer, près de deux heures après, que j'ai relativisé. Elles ne savent pas lire. Les lettres, je veux dire.

Yvonic était furax et avant d'entamer son yogging-défouloir, il s'acharnait sur une partie de basket, à l'ordi, les nerfs à vif. Entre temps, j'avais retrouvé de mon calme et c'est très librement que nous avons débriefé avec nos formateurs, un rien décontenancés par le message de ce jury très particulier. Elles avaient du mal à comprendre qu'Yvonic, qui souhaite se lancer dans l'animation de soirées, ne veuille pas travailler le samedi. Tu m'étonnes, il n'a jamais affirmé une telle ineptie! Je n'ai pas échappé au lynchage, puisque cette admirable experte-comptable m'a reproché de trop m'éparpiller, à vouloir faire le marché ET ouvrir un local. J'ai parlé de lancer mon activité en m'installant sur le marché, avant d'ouvrir un resto en dur. Nuance.

Au fond, tout cela n'a que peu d'importance car il semble bien qu'au delà de nos doutes et de nos préoccupations, cette experte es-chiffres n'a pas écouté les volontés des uns et des autres et qu'elle n'a pas trop compris le concept d'un business-plan. Pour elle, l'étude de marché, qui détermine notamment le chiffre d'affaires et les perspectives d'avenir, doit venir après le prévisionnel, et non avant, comme le préconisent toutes les formations de création d'entreprise. Hum. 'Comprend décidément que les petits 1, 2, 3, 4..., celle-là.

Je n'ai aucunement perdu confiance. D'ailleurs, Emmanuelle (c'est son p'tit nom, à la dame amoureuse des chiffres) a affirmé que le marché était une excellente idée, et que je pouvais donc me lancer dans cette aventure. Sur ce, elle a refermé mon bouquin rose chéri, d'un geste de dédain, après l'avoir sali de ces ratures intempestives et a lâché : "ce sera quand même plus rentable que ça. Là, il y a vraiment des choses à revoir." Je vous épargne la petite moue qui va avec.

Un vrai bonheur. Après tout, ça ne fait jamais que trois mois pleins que je potasse dessus. Ce n'est pas comme si je m'étais investie.

...

L'heure des au-revoir avait donc sonné. Après trois mois passés à l'AFPA, nous devons continuer - ou pas, d'ailleurs, pour certains - le parcours du combattant, seuls. Au final, Sophie et son élevage canin - seule entreprise déjà immatriculée - Frédéric et son entreprise de chauffage, Yvonic et sa boule à facettes (je le vois déjà crier "ça m'énerve"...) et moi poursuivons le combat, pendant que Florence et Thierry doivent mettre leur beau projet en veilleuse, ayant à régler des situations complexes. Marie-Charles, elle, a renoncé à se lancer seule, cherchant désormais une autre voie. Josiane a reporté sa formation. Céline a disparu de la circulation, après son échec d'association avec Sandrine. Quatre sur dix susceptibles de se lancer dans les mois à venir, est-ce un échec? Ou un nombre décent?

Je vois déjà l'experte-comptable débouler avec ses gros sabots et dire que, de toute façon, à partir du moment où on sous-évalue le gaz, on n'arrive à rien. Je suis bien contente de l'avoir privé de mon moelleux au chocolat. Y'a des choses qui se méritent. Non mais.

mardi 14 juillet 2009

Liberté chérie

La liberté, c'est...

Pouvoir croire que l'on a quinze ans et que la vie est à nous.

Oublier les heures et seulement savourer les doux moments d'une vie sans contraintes.

Simplement chantonner un air mille fois entendu, mais que l'on redécouvre, simplement, au détour d'une soirée dans un lieu inconnu.

Se lâcher, oublier que l'on chante comme une casserole et s'époumoner sans peur du ridicule.

Danser en mettant de côté son balai et sourire béatement aux premières notes d'une mélodie que l'on adore.

Rire bêtement pour des détails auxquels on ne prêterait aucune attention, en temps normal.

Parler avec ses amis sans peur d'être jugé.

Buller sans une once de culpabilité.

Se rouler dans le sable chaud et se jeter dans l'océan, sans peur du froid qui enveloppe soudain le corps.

La plage désertée, alors que le ciel s'obscurcit, et le doux contact avec le sable refroidi.

L'idée que le monde nous appartient, alors que l'on a coupé avec, quelques jours durant.

Il suffit parfois de peu pour se sentir libéré. Sentiment banal que suscitent les vacances ou un simple break, mais tellement précieux et régénérateur! Je savoure ces moments de bonheur, cette sensation inouïe de béatitude, cette conviction folle que Demain sera beau. Le vrai petit demain me ramène d'emblée à la réalité mais je ne veux pas oublier l'essence même de la vie, quand la générosité et la gentillesse embellissent le quotidien.

Merci les amis, merci Marie.

samedi 11 juillet 2009

Les grandes vacances

Il est cinq heures. La nuit a été courte. La maison se réveille, s'agite, des bruits de pas dans l'escalier, l'eau de la douche qui s'écoule... Aujourd'hui, on part à la mer. Un mois. J'ai eu du mal à m'endormir, excitée par l'idée de partir au soleil, de passer du temps en famille. Pourtant, la tension est là. Ma mère essaie vainement de me faire avaler une petite pilule bleue, contre le mal des transports. Je mange bien la confiture à la fraise qui l'entoure, mais rien à faire, le médicament miracle a du mal à passer. Maman replonge la cuillère à trois reprises dans le pot, en grommelant. Elle s'énerve, dit que de toute façon, c'est dans la tête. Et que ça sert à rien car de toute façon, je vais finir par vomir. Mon père arrive, demande ce qu'il se passe, prend ma défense. Ma soeur se prépare, pendant ce temps, sans en faire des caisses comme moi.

Mon père vérifie quinze fois s'il a bien coupé l'eau, le gaz, débranché la prise télé, si ses cales en bois, pour bloquer le garage (!), tiennent bien. Si le vélo ne va pas se décrocher, sur le toit de l'Alfa Roméo. Nous l'attendons dans la voiture chargée à ras-bord, les bras croisés. Nous roulons trois kilomètres et j'ai déjà mal au coeur. Ma mère râle, me supplie de penser à autre chose, mon père tourne la tête vers moi, l'air inquiet et ma soeur me chambre.

Je finissais toujours par vomir.

Au fil des ans, on a abandonné l'idée de la cafétéria sur la route, qui provoquait systématiquement chez moi des nausées et on a adopté le pique-nique. Je garde un souvenir ému de ces "grandes vacances", ce moment à part me donnant l'illusion d'une vie familiale soudée et aimante. Et même quand ma mère grognait contre la pilule bleue et contre la lenteur de mon père, même lorsque ma soeur et moi ne cessions de nous chamailler, je pensais en mon for intérieur que moi aussi, quand je serais grande, je partirais pour les "grandes vacances". Avec mon mari et mes enfants.

Trente ans plus tard, on ne part plus un mois en vacances. Et puis, si j'ai bien un fiston, je n'ai pas de mari à disposition pour envisager un scénario familial digne de ce nom.

En attendant le retour de mon loulou, j'ai donc décidé de faire des sauts de puce, à droite, à gauche, histoire de prendre un peu l'air, mais aussi de rester à l'affût d'une éventuelle affaire. Tout ça me va bien. Après trois mois passés à l'AFPA, je veux rester dans cette dynamique et ne pas relâcher (trop) mes efforts. C'est tout le paradoxe des chômeurs comme moi: on ne bosse pas mais les vacances ne signifient plus grand-chose.

Jeudi soir, j'ai rangé mes cours, fait le tri. J'en ai relu quelques-uns et j'ai eu l'impression de faire un sacré bond dans le passé, tant les choses ont évolué. Pourtant, le combat continue. Alors, je m'accorde un p'tit week-end prolongé, où j'irai peut-être danser au bal des pompiers. Et après, je repars à l'assaut! D'ailleurs, je passe devant le "grand jury" mercredi, pour valider mon projet. En attendant, excellent week-end à vous...

vendredi 10 juillet 2009

Jouer à la marchande, part two

Dans le village vendéen où nous passions nos vacances estivales, nos motivations principales, c'était la plage, le glacier - qui passait avec sa camionnette et qui nous appelait au son de sa cloche - et les parties de foot dans le grand terrain autour de la maison que mes parents louaient.
Et quand on voulait rire un peu, on prenait le cabas et hop, direction le marché. Au (mauvais) son de "Méditerranéenne", terrible chanson d'Hervé Vilard que les marchands de cassettes s'obstinaient à diffuser, nous déambulions dans les allées, achetant un peu, observant beaucoup la faune locale.

Tout ça était très bon enfant. Pas très classe, mais bon enfant.

Des années plus tard, j'ai à mon tour installé mon étal, bien décidée à vendre tout mon barda sur un vide-grenier, déménagement oblige. J'y ai retrouvé ce même mélange de population, ces pros de la collection en tout genre, bouquiniste, philatéliste et autres, dégainant leurs liasses de billets à 6h du matin, au cul du camion ; ces badauds qui jettent un oeil mais qui seraient tellement mieux dans leur jardin; ces acharnés du marchandage qui voudraient qu'on leur donne l'objet convoité, avec quelques pièces, tant qu'à faire...

C'était fatigant, mais exaltant. Je me levais à 5 h du mat', et filais m'installer avant que le gros des marchands ne débarquent. Ambiance particulière de ces matins où l'intensité est déjà de mise, alors que le soleil se lève... Où l'on s'affaire à monter le stand, ranger l'étal, mettre en valeur les quelques mètres carrés qui nous sont octroyés...

J'ai remis le couvert quelques fois. A deux, trois reprises, peut-être. J'ai connu tous les temps. Il a plu, beaucoup. C'était horrible, les gens filaient en courant, rejoignant leur voiture pendant que nous, pauvres commerçants d'un jour, nous échinions à trouver une bâche de fortune pour tenter de sauver la marchandise. Quand la pluie cessait, nous constations les dégâts, un peu las, mais n'avions jamais le temps de faire sécher quoi que ce soit, les clients revenant à l'assaut au premier rayon du soleil.

Puis cela a été le cagnard. Luttant contre les coups de soleil à grands coups de spray, je tentais vainement de convaincre les égarés, en sueur, marchant péniblement, d'acheter ce si joli manteau d'hiver ou ce magnifique pull... J'étais seule derrière mon stand, à vendre. Paradoxalement, à chaque fois, j'ai ressenti cette même énergie débordante des marchands, les mêmes oeillades complices après le passage d'un client difficile, la même adrénaline quand un chaland s'arrêtait, regardait, achetait... J'aimais raconter la provenance de certains objets dont je me délestais, entamer la conversation avec la maman qui me débarrassait du stock de vêtements de mon loulou, garder le stand du voisin, le temps qu'il fasse une pause. J'aimais cette solidarité.

J'ai retrouvé aussi le même côté désuet qui habitait déjà le marché de mon enfance. C'était ça, pour moi, faire le marché. Pas du commerce au rabais, non. Une autre forme de commerce. Où l'on découvre une solidarité entre certains chalands, une rivalité pour beaucoup d'autres.

Maintenant que mon gros livre rose est prêt, je peux vraiment m'atteler à la recherche d'un local. Cela peut venir demain, cela peut venir bien plus tard. Alors, pour me lancer, vraiment, cette fois, tester mes produits, me faire connaître, pourquoi ne pas rejoindre le clan des vendeurs ambulants?

Vous m'auriez dit cela il y a quelques mois, je me serais esclaffée, avec en tête l'abominable mélodie d'Hervé Vilard. Aujourd'hui, j'ai revu mon jugement. Cet après-midi, par un heureux hasard, j'ai évoqué avec un agent immobilier la possibilité de reprendre un local que j'avais repéré. Mais je ne le vois plus comme une condition sine qua non pour me jeter à l'eau. D'autres alternatives existent.

Il est pas beau, mon poisson?

jeudi 9 juillet 2009

Jouer à la marchande, part one

J'ai une couronne en papier sur la tête. Les cuisses moulées dans un collant moutarde. Je suis habillée style moyen-âge. J'ai 8 ans.

Je panique un peu, je prends une grande respiration et je me lance. Ce jour est important pour moi, c'est le pestacle de fin d'année et je tiens un double rôle dans notre petit théâtre scolaire: conteuse et marchande de poisson.

Je suis chargée de présenter le contexte et les personnages à ce public tout acquis à notre cause (que des parents au regard énamouré, quel bonheur...) et je flippe grave. A l'époque, je ne l'exprime pas ainsi parce que nous sommes encore dans les années 80, parce que je suis une petite fille bien polie, aussi, mais enfin, le palpitant ne me lâche pas. En plus, je dois me souvenir de mon texte et ne pas me mélanger les pinceaux avec l'autre personnage que je joue.

La marchande de poissons.

J'ai peur d'oublier, de tout confondre, de ne pas être à la hauteur. Je ne suis plus en CE2, je me crois sur une scène de Broadway, d'un coup. Comme d'habitude, je me fais un monde d'un truc tout bête. Parce que la poissonnière, elle a une phrase à balancer.

"Il est beau mon poisson de la Loire, il est beau!"

Une phrase, oui, mais quel bagou! Ma mère rit (de honte?) de me voir haranguer ainsi la foule.

A la fin, tout le monde applaudit et la maîtresse me félicite. Tu m'étonnes que j'étais crédible, dans le rôle de la poissonnière! Moi, la gamine maladroite, plus attirée par les petites voitures que par les poupées. Pourtant, au fond de moi, j'aimerais être une petite princesse, habillée de rose, gracieuse et délicate. Et surtout pas une dame en tablier sale qui dépiaute du poisson, en criant "il est beau mon poisson de la Loire".

J'ai 10 ans. Parce que je veux m'acheter cette machine à écrire tellement désirée, je traîne deux copines avec moi, un mercredi après-midi, leur colle des Bibliothèque Rose et des Bibliothèque Verte dans les mains et je les nomme commerciales de choc. Nous partons faire du porte-à-porte. Les voisins ne cachent pas leur surprise de voir sonner à leur porte des gamines avec de gros sacs de livres. Sans doute par pitié, certains nous achètent des livres. D'autres nous rabrouent sans complaisance aucune. A la fin de la journée, on se partage la recette. Enfin, comme c'était mon idée et que les bouquins étaient miens, je leur distribue généreusement 5 francs. Oui, 5 francs, ce n'est pas une erreur. Ce jour-là, je perds deux copines. Mais je me découvre la bosse des affaires.

J'ai 15 ans. Autour de moi, les filles se maquillent, certaines outrageusement, même. Elles s'arrachent les blousons Chevignon, Chipie et chaussures Bensimon. Moi, j'ai craqué pour un challenger Adidas, que je remets sitôt lavé. Ce fabuleux yogging ô combien féminin s'assortit parfaitement à de grosses Nike. Rouge. Mes copines s'émancipent et moi, je suis un garçon manqué. J'aimerais tellement être aussi jolie qu'elles, mais je passe trop de temps sur les terrains de basket pour que l'on puisse envisager que je suis une vraie fille, au potentiel de princesse. Avec du mascara et du blush, j'aurais l'air déguisée là où leur coquetterie est naturelle.

J'ai 25 ans. Je suis entourée de garçons à la rédaction et je jure comme un charretier. Je sais, ça manque de classe. Ne manquant jamais une occasion de me titiller, mes chers collègues me traitent de poissonnière. Je déteste. Je n'ai pas cédé au tout-rose, un peu trop girly. Mais j'aimerais bien me doter d'une touche de féminité, histoire que les garçons me voient autrement que comme l'un des leurs. Et j'ai toujours l'image de la-femme-au-tablier-sale-qui-crie-il-est-beau-mon-poisson,-il-est-beau...

J'ai 34 ans. J'ai renoncé au tout-girly. Au fond de moi, je serai toujours un garçon manqué, même si mes dix milliards de fringues qui croulent dans mon armoire et mes cinquante fards à paupière me permettent de jouer à la fille.

En revanche, j'ai trouvé ma voie. Je ne serai pas poissonnière, non. Mais il est possible que j'aille ouvrir mon bagou sur le marché...

A suivre...

mercredi 8 juillet 2009

Un gros macaron rose sur le crâne

Il est rose. Un peu gros. Ce n'est ni un cochon, ni mon Jéjé et ses 350.000 cochonou planqués dans son pull rose (désolée, lui seul comprendra...) mais mon dossier final. Le Business plan, messieurs dames, qui va me servir de passeport auprès des banques et associations diverses que je ne vais pas manquer d'aller démarcher. Comme ça, s'ils l'approuvent, c'est banco.

S'ils le refusent, je pourrais toujours leur taper sur la tête avec, ça fera pas de traces.

Dommage que mon appareil-photo soit en rade, parce que j'en suis tellement fière que je vous aurais bien montré la couv'. Allez, je vous mets l'eau à la bouche, y'a un joli macaron à la framboise dessus, avec le nom de mon resto (virtuel, oh, faut suivre, là!). Que je ne peux pas vous dévoiler pour l'instant, c'est top-confidentiel.

A l'intérieur, vas-y que je t'ai collé des madeleines, cannelés et autres muffins, histoire de leur donner l'eau à la bouche, à ces décideurs qui vont influer sur la suite de l'aventure. C'est vrai, je pourrais très bien faire appel au carrossier pour qu'il les aide à dire un grand oui. Il a encore prouvé aujourd'hui qu'il était un sacré phénomène. Un peu du genre Obélix, vous voyez le style. Le type qu'est tombé dedans quand il était petit. Bref, ce ne serait pas du jeu que de faire appel à la force, alors je vais juste garder confiance.

J'ai éprouvé cette incroyable sensation du devoir accompli, en reliant le dernier exemplaire. C'est drôle car, à pareille époque de l'année, j'ai toujours été très angoissée, à la bourre et complètement obsédée par mon boulot. C'était l'époque des traditionnels transferts, dans les clubs français, et il fallait appeler les coaches, un par un, les rappeler, prêcher le faux pour tenter d'arracher une news... C'était du sport et quand venaient les derniers jours de bouclage, je me sentais dans un état second. Des cernes pas possibles, les yeux brouillés, le teint pâle, j'étais une boule de nerfs. Mais quel incroyable soulagement quand je raccrochais pour la dernière fois le téléphone! C'était fini.

Généralement, j'allais alors ranger mon home sweet home, totalement délaissé depuis trop longtemps, faisant le tri, le vide et songeant aux vacances à venir. Ce soir, je me suis contentée d'une micro-dose de tout ça, sachant que pour la farniente, c'est pas gagné. Car j'ai rendu mon dossier, je passe devant le jury dans une semaine, mais je sais que cette fois, tout va commencer.

Où et comment, je l'ignore. Il y a tant de pistes à explorer!

Et puis, me cherchez pas, hein : Un gros business plan sur le crâne, ça doit faire mal...

mardi 7 juillet 2009

Woody, le carrossier et RSI-Man

J'ai toujours aimé Woody Allen. Son côté névrosé assumé, sans doute, qui me parle tellement... Ce matin, j'avais décidé qu'entre deux séances afpaiennes, je m'offrirai, dans la soirée, un p'tit ciné. "Whatever works" tombait à pic.

Cet opus est un petit bijou et, après l'épopée européenne de Woody - que j'avais adorée - c'est un régal de retrouver notre metteur en scène yankee chez lui, à Manhattan. Allez voir cette rencontre entre un génie désabusé et une blonde vraiment blonde, c'est cocasse, délicieux et d'autant plus jubilatoire que Woody en rajoute des louches, au fur et à mesure de l'histoire.

Et puis, je crois que j'ai tout simplement aimé le titre. Whatever works. "Tant que ça marche" nous dit donc Woody Allen, à travers son clone, l'aigri et asocial Boris. Peu importe la façon d'y arriver... Une fois encore, le message de Woody me parle. Et d'autant plus que j'ai pas mal médité sur la tournure que je devais donner à ma p'tite vie, ces derniers jours, et sur le soutien que j'avais pu recevoir. Un soutien inattendu, opportun, précieux car finalement, je ne me sens pas si seule.

Mine de rien, cela a eu le don de me booster, aujourd'hui, malgré une matinée un rien pénible avec un intervenant du RSI, autrement moins drôle que sa collègue, la rebelle, fâchée contre les carrés. J'ai bien essayé de le neutraliser, en l'étouffant avec un muffin au chocolat, mais il est arrivé vers moi la bouche en coeur, en me disant qu'il avait adoré le gâteau. En bon boulet, il avait jeté le moule à silicone dans la poubelle. Grrrrr.

A la fin de sa session, assez éprouvante pour les paupières - tenir, empêcher qu'elles tombent, allez allez, elles ne sont pas lourdes - le p'tit gars du RSI a eu l'outrecuidance de nous demander s'il ne nous avait pas rasés, par hasard. Là, l'un des stagiaires afpaiens présents, futur carrossier de son état, n'a pas hésité.

- "Si", qu'il a répondu. "Et d'ailleurs, vous savez ce que j'en fais, des gars comme vous?"

- "Euh, non?" s'est inquiété RSI-Man en prenant nerveusement la serviette pour essuyer le tableau blanc.

" Ben, je les remets à leur place."

Il s'est levé. Ai-je besoin de vous préciser que le carrossier en question, s'il n'est pas grand, en impose néanmoins, avec son quintal largement dépassé depuis un moment ?

Oui, mieux vaut que je vous le précise, c'est plus parlant.

Il a bombé le torse, ses pectoraux restant néanmoins recouverts d'une sacrée couche de graisse, s'est dirigé vers RSI-Man, qui commençait à suer de partout, et lui a donné une tape sur l'épaule.
"Hein, mon p'tit bonhomme?!"

RSI-Man a continué d'essuyer le tableau, murmurant:

"C'est pas grave, euh, on vous enverra directement l'huissier."

"M'en fous, les huissiers, c'est pareil, ils sont tout petits"

A part cet intermède, disais-je, j'ai senti un regain d'énergie et l'envie revenue de concrétiser mon projet. Par la fenêtre ou la cheminée, j'y arriverai! Cela suscite une remise en question permanente et la recherche de nouvelles pistes, dont certaines que j'ai déjà évoquées récemment et que je ne peux exclure. Mais à la vue des muffins avalés goulûment par les afpaiens du jour, je me dis qu'il y a moyen de contenter quelques gourmands. Que je me dois d'essayer.

J'ai relu mon "business plan". Et décidé de suivre mon instinct, ce que m'a d'ailleurs conseillé mon nouvel ami (facebookien) Jésus, en ne cherchant pas à répondre aux schémas classiques de la restauration mais bien en imposant mon propre timing. Cela limitera forcément le chiffre d'affaires, lorsque je fermerai à 18h au lieu de servir le soir, mais c'est aussi un choix de vie. Mon prévisionnel m'indique que je peux m'en tenir à mes postulats initiaux. Je peux aussi choisir de me développer, mais pourquoi se précipiter ? Je vais laisser le temps au temps. Tant que ça marche...

dimanche 5 juillet 2009

L'habitude intolérable du manque

Qui va me réveiller le matin en criant: "J'ai fini de dormir?"

Qui va faire de mon salon un champ de bataille en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire, installant là des magazines de foot, ici des magnets, voire... un but?

Qui va tenter de squatter l'ordinateur ?

Qui va me supplier de le regarder à chacun de ses mouvements sur un terrain... de foot?

Qui va me traîner dans les magasins, en quête du maillot parfait?

Qui va m'obliger à compter jusqu'à trois, avant d'obtempérer?

Qui va faire son petit visage d'ange pour obtenir mes grâces?

Qui va me demander quinze fois, le soir venu, une autre histoire, un verre d'eau, un pansement, une autre histoire, un drap, la lumière dans le couloir, une autre histoire... ?

Qui va m'obliger à jouer le rôle du papa ET celui de la maman en même temps?

...

Ce soir, mon fils est parti chez son papa pour les vacances. Trois semaines. J'aurais dû y voir l'occasion de souffler. Mais en le regardant partir vers d'autres horizons, j'ai songé à tout ce que j'allais rater. A tous ses rires, à tous ses caprices, à tous ses mouvements d'humeur. Je me suis dit que j'allais le trouver changé d'ici là, qu'il m'appellerait "papa" les premières heures de son retour, qu'il faudrait remettre les points sur les i d'emblée et retrouver notre petite vie.

Comme d'habitude.

Je le voyais filer, presque indifférent, déjà à l'aise dans son autre maison. Mon coeur s'est serré, je n'ai pas demandé mon reste, prête à le laisser. Il est revenu en courant vers moi, quelques secondes, accomplissant le rituel de toute longue séparation, spontanément. Les larmes au bord des yeux, j'ai béni mes lunettes de soleil et pris le chemin du retour.

Le retour vers une drôle de vie, soudain dénuée de sens. Comment je faisais, avant ? Je veux dire, lorsque j'étais célibataire, sans enfant? Qu'est-ce qui me faisait vibrer? J'en vois deux au fond qui bondissent, alors je les rassure tout de suite: je m'accomplis, sans mon enfant. Il n'est pas toute ma vie. Il n'est surtout pas l'homme de ma vie (!). Mais tout de même, quel vide, d'un coup!

Je devrais y être accoutumée. Cela fait trois ans que mon loulou a deux maisons, qu'il va de l'une à l'autre sans broncher, que l'on vit des plages loin l'un de l'autre. C'est tellement banal! Mais la banalité n'efface pas le manque. Et quand vient l'été, je sais que j'ai juste à me regarder le nombril et à ne me soucier (presque) que de moi. Sauf que c'est tellement rassurant de s'oublier, de ne pas se regarder dans le miroir et de jouer à la maman attentionnée.

Et puisque je n'ai plus de prétexte pour être accaparée, que les soeurs ne me seront sans doute pas du meilleur conseil et que la ville est un rien désertée, je vais me plonger dans le monde merveilleux qui m'attend: mon avenir.

Jésus a raison, je suis vraiment toute petite

Les soeurs de la Providence, disais-je... Ce matin, en allant vérifier leur nom sur la boîte aux lettres, une femme est venue me demander à quel étage habitaient les soeurs, justement. C'est un signe.

Pourquoi donc ai-je songé à monter les voir?

Parce qu'elles poussent un peu le bouchon à mettre leur techno trop fort? Euh, pas leur genre.

Parce que j'ai envie de rentrer dans les ordres? Euh, non plus.

Parce que j'ai été touchée par la grâce ? Pas mieux.

En fait, c'est l'idée même de la Providence qui me plaît, ça me donne l'illusion que l'espoir est encore de ce monde. En plus, ces deux soeurs, fort gentilles au demeurant, aident les personnes en réinsertion sociale. Les ex-taulards, si vous préférez. Alors, je me suis dit qu'elles pourraient bien allumer un petit cierge pour moi, parce que là, l'énergie commence à me faire défaut.

Ensuite, j'ai pensé que 1/ je suis assez grande pour ne pas avoir à demander la charité et 2/ Dieu et moi (à part Jojo, je veux dire), ça fait deux. Pas baptisée, athée, ignorante de la religion, pour vous dire, j'adore quand les mariages se font de façon civile, only. Parce que dans une église, j'ai l'air d'un éléphant au rayon vaisselle d'IKEA, du style à ne pas savoir comment me mettre, debout-assis tout le temps, à regarder béatement tous les voisins chanter des Amen. Franchement, je ne fais même plus mine de connaître les paroles. Pour vous dire, la dernière fois que je suis allée à un mariage, avec la totale, j'ai pris la meilleure excuse possible pour ne pas suivre la messe: je gardais un bébé, au fond de la salle. Merci Emile, d'ailleurs, tu as été un ange.

Je m'égare, mais cela vous donne une idée de mon léger dépit. D'une forme de découragement, je dois l'avouer. Car pendant que je vous narrais ma love story virtuelle avec Jojo, les choses ont pas mal avancé cette semaine. J'aurais eu de quoi alimenter le blog de quelques posts, je crois, mais il était bon, pour mon moral, de me contenter de flash-back, au risque de passer pour une dépressive en phase terminale - ce qui n'est pas le cas, je vous rassure.

J'ai en effet passé ces derniers jours à "concrétiser" mon projet. A savoir, chercher un local - que je ne mettrais pas quinze vies à rembourser - et réaliser mon prévisionnel. C'est ce dernier qui m'a mis un coup, je crois.

En fait, j'ai commencé à remplir les cases, en gonflant un peu les prix des achats, parce que, quand même, c'est bien d'investir dans du beau matos, et me voilà à surfer sur les sites de professionnels avec toute la batterie de cuisine qui va bien, les plus beaux moules, les théières en fonte de la mort-qui-tue... Je me suis pris un salarié, payé au SMIC - faut pas pousser non plus - quelques heures d'extras, un salaire à peu près décent pour moi la deuxième et troisième année. J'ai estimé l'achat de mon fonds de commerce à 100.000 euros (une véritable "affaire" que je piste actuellement) avec un loyer de 1000 euros mensuels. Ensuite, j'ai ajouté les charges, ah oui, quand même. Le logiciel a mouliné et paf, vue du compte de résultat synthétique (des heures de compta pour ça...).

Mais, euh, c'est normal, tous ces "moins" devant les chiffres ? Doit y'avoir une erreur, je suis à -30000 dans ma troisième année...

Là, je me suis dit que finalement, je n'avais pas besoin d'un wok à 80 euros ni de théières en fonte, que je pourrais bien ramener deux-trois babioles de chez moi. Mon fonds est passé à 60000, puis 50000 euros. J'ai viré mon salarié (eh oui, déjà! De toute façon, il allait râler avec son salaire de misère), me suis baissé mon propre prélèvement - en m'interrogeant sur l'intérêt de garder Canal Sat et de m'acheter vingt milliards de fringues chez H&M, finalement -avant de rogner sur toutes les charges. Au fur et à mesure de la journée, je grignotais mon découvert virtuel avant d'entendre le formateur me balancer: "t'es pas assez chère! Ta part de tarte, là, c'est pas deux euros, c'est cinq!"

Aussitôt dit, aussitôt fait, j'ai revu mes prix, mes chiffres d'affaires annuels et, ô magie, j'ai un prévisionnel qui tient la route. Sauf que je gagnerai moins qu'un Smicard - un détail.

Dehors, l'orage avait éclaté. Des trombes d'eau. Dans la salle, j'étais en train de prendre une douche froide, à la vue des chiffres. Je me suis dit que ça allait être compliqué. Que tout ceci n'était qu'une chimère et que j'allais me réveiller, devant mon écran, et repartir sur un lieu de reportage.

Mais c'est là le hic. Je n'ai pas spécialement d'alternative. Ne plus écrire me manque et l'envie de retourner dans le journalisme me démange. A vrai dire, cela fait un petit moment que je le ressens, mais je ne voulais pas l'avouer. Me l'avouer. Je me demande aujourd'hui si je ne devrais pas aller postuler, à droite, à gauche, sachant que dans la presse aussi, les temps sont très durs et que ma place n'y est absolument pas garantie.

Au quotidien, pourtant, je continue de me battre pour ce projet, de me prendre du vent, de travailler et mon business plan a dépassé la centaine de pages. Mais c'est vrai, je doute sur la viabilité de l'affaire. Cette semaine, j'ai eu une longue discussion avec une jeune personne, dynamique et entreprenante (non, pas Scarlett), et nous avons évoqué l'idée de travailler ensemble. Elle aimerait que notre structure soit basée sur une association Loi 1901, "grâce à toutes les subventions que l'on peut récolter", m'a-t-elle assuré. Elle me dit que certains bars à jeux (son concept de départ) fonctionnent ainsi, qu'il faut creuser la piste, que c'est moins risqué qu'un commerce.

Le risque ne me gêne pas tant, je crois même en avoir besoin pour avancer. Ce qui me perturbe davantage, c'est la sensation que je trompe mon monde, que je suis une usurpatrice, que demain, on va réaliser que toute cette histoire de restaurant, c'est du vent.

Cette semaine encore, j'ai fait la connaissance d'un chef de cuisine, bien inspiré, dont je vous conseille d'ailleurs le site et le blog. Il m'a donné plein de conseils avisés et je crois qu'entre son avis d'expert, le prévisionnel et les locaux à 300000 euros, j'ai pris peur. Du coup, j'ai passé deux jours sans mettre le nez dans mon projet, ni même à en parler, ou si peu- un exploit, vu que je suis intoxiquée - en empilant seulement tous les documents, négligemment dans mon salon, plus bordélique que jamais. J'ai repensé à ce que m'avait écrit ce chef. "Vous n'êtes pas superwoman... La restauration est un métier super dur..." Des réalités qui m'ont rattrapée.

Et si je vous dis que le type en question s'appelle Jésus, vous comprendrez pourquoi j'ai songé à en appeler à mes voisines les soeurs!

samedi 4 juillet 2009

J'ai retrouvé la dame au cochon!

En attendant de vous raconter si j'ai été touchée par la grâce (ah ah), je ne peux m'empêcher de vous offrir une photo, la première sur ce blog (ça se voit, la mise en page est d'anthologie. Cliquez dessus pour zoomer), prouvant que je ne suis pas une mytho et qu'une dame peut se balader avec un cochon dans les rues de Salt Lake City, sans que personne n'y trouve à redire...

Et sinon, bienvenue aux lecteurs de l'excellent basquetebol.org, qui seront certainement déçus en découvrant que ce blog ne traite pas (que) de basket. Nul n'est parfait

Jojo in Paris, ou comment je suis restée baba

Ce qui est bien avec Michael Jordan, c'est qu'il fait l'effort de venir et je l'ai ainsi vu à deux reprises, en France. Oui, bon, OK, ce n'était pas (que) pour moi mais c'est l'intention qui compte, non?

Après notre courte entrevue en juin 1997, Jojo venait donc à Paris en septembre de la même année. Jouant les pots de colle à outrance, je l'avais suivi partout, des lattes de Bercy au studio de Canal +, où il avait été invité pour l'émission "Nulle Part Ailleurs". Les Américains qui viennent visiter notre jolie capitale sont tous les mêmes. Sauf Mike. Malgré son statut d'icône, il reste très humain, sensible et attentif aux autres. Ou du moins, c'est un excellent comédien. Lors de sa venue avec les Bulls, à l'occasion du tournoi Open McDonald's - qui réunissait ténors européens et champion NBA, sur le Vieux Continent - il avait bluffé toute l'assistance, sur et en dehors du terrain.

Neuf ans plus tard, mon chef vient me voir et me parle d'une rumeur persistante: Michael Jordan viendrait à Paris. Je dois relater l'événement. Mais Jojo, il ne joue plus, oh! Si c'est pour parler de ses frasques conjugales, ses affaires foireuses ou sa passion nouvelle pour la moto, je ne vois pas l'intérêt. Bon, évidemment, je vais y aller, j'ai ma conscience professionnelle, bien sûr, et ce n'est pas du tout pour le simple plaisir de le revoir que je me vais finalement accepter de me rendre à quelques encablures des Champs-Elysées, dans le fastueux Palais Ledoyen. Non.

La rumeur se confirme mais chut, il ne faut pas l'ébruiter, il y a une liste réduite d'invités à cette conférence de presse. Je suis une VIP, je suis une VIP! J'ai soudain plein d'amis qui veulent m'accompagner. Désolée, les gars... Moi qui croyais que Jordan avait quasiment viré dans la catégorie has-been, me voilà bien obligée d'admettre qu'il fascine toujours autant.

En arrivant dans ce fameux palais, j'en ai d'ailleurs la confirmation. Le contraste est saisissant entre l'ambiance feutrée que confère un tel endroit et l'effervescence palpable. Vieux roublards ou jeunes Rastignac, les journalistes présents, triés sur le volet je vous le rappelle, sont excités comme des puces. Il y a ceux qui ont déjà eu affaire à Mike et qui la jouent blasés, mais qui, intérieurement, sont en pleine ébullition. Et les autres qui ne cachent même pas leur exaltation à rencontrer, enfin, l'idole de leur jeunesse. En vrai. A l'intérieur, c'est la folie, on dirait les finales NBA, avec des caméras partout. Le pire, c'est que tout le monde se contrefout de la raison qui amène la star à Paris. Seule sa présence compte.

Je retrouve des confrères, on s'installe et on discute en attendant l'arrivée de Mike. Souvent, dans ce genre de retrouvailles, entre deux bouclages, les scribouillards aiment à se plaindre, entre eux, l'horaire, le lieu, la personne... Là, tout le monde est heureux. L'ambiance s'avère on ne peut plus dissipée, quelques dizaines de minutes plus tard.

Soudain, un frémissement.

Jojo est là. Silence. Question look, c'est un peu la cata, avec son costard à gros carreaux blancs, les boutons de manchettes dorés, l'énorme montre bling-bling et sa cravate orange. Pour le reste, il n'a rien perdu de son aura. OK, il a un peu empâté depuis sa retraite, trois ans plus tôt. Cou épais, traits plus marqués, rides visibles, Jordan a 43 ans. Mais il lui suffit de sourire pour embarquer toute l'assistance. Je le revois encore, à se passer sa si célèbre langue (pour les néophytes, il la sortait quand il partait au dunk) sur les lèvres, l'air mutin, nous regardant, amusé.

J'avoue, je n'ai pas retenu tout son discours sur la marque qu'il venait promouvoir. Comme les autres, j'étais simplement conquise devant tant de charisme - et après tout, je venais pour écrire un papier d'ambiance, pas pour lui servir la soupe. Mais je n'ai pas manqué l'occasion de lui parler, enfin. Fébrile, j'ai levé la main. "Yes ?" qu'il m'a fait, fixant son regard dans le mien. J'ai lâché ma question, il a souri, y a répondu, j'ai vite fait jeté un oeil dans la salle, regardé Mike et, sentant son approbation, hop, osé une deuxième. Je ne vous explique même pas, une vraie midinette, mais genre, sérieuse, concentrée sur les dires de Jojo. Mes questions étaient insignifiantes mais rien que de lui parler, je sentais mon coeur battre à tout rompre.

Voilà, c'est ça l'effet Jordan. C'est unique. J'ai eu la chance de rencontrer beaucoup de basketteurs, des très bons, des moins bons, des célèbres et des anonymes. Des chiants, des pénibles, bien sûr, mais énormément de personnes attachantes, respectables et adorables, aussi.

Jojo est à part.

Sans vouloir l'idéaliser (il était perçu comme un tyran, du temps des Bulls, dictant ses lois à ses coéquipiers et sa reconversion, après le basket, n'a pas été sans heurts), j'avoue que je le situe au-dessus de toutes ces considérations. Les palpitations qu'il a toujours suscitées chez les autres ne sont que le signe d'un être d'exception. Je ne tire aucune gloire de l'avoir rencontré, j'ai juste conscience d'avoir croisé une personne rare. J'imagine qu'aujourd'hui, c'est le même sentiment qui anime ceux qui ont la chance de côtoyer Barack Obama.

Demain, je vous raconterai pourquoi j'envisage d'aller sonner chez mes voisines du dessus, les soeurs de la Providence (ou de la Miséricorde, j'ai un doute). Un vrai retour aux réalités!

vendredi 3 juillet 2009

Jojo, l'antidépresseur

Michael Jordan en ferait bien d'autre, vous disais-je... Après ce final éblouissant et un dernier sacre en 1998, Jojo tire sa révérence pour la deuxième fois. Désormais, quand je pars en NBA, je sais que je ne le croiserai plus qu'en costard-cravate. A priori.

La vie sans Mike, c'est fade. En 1999, je suis à New York à me geler lorsque la NBA annonce que la grève des joueurs va raccourcir la saison. En 2000, j'assiste au All Star Game à San Francisco (Oakland, pour être précise). Il y a bien Al Green, qui me colle des frissons lorsqu'il entonne l'hymne national. Il y a bien Vince Carter, qui multiplie les arabesques dans les airs, il y a bien la jeune génération, mais tout ça manque de sel.

En 2001, Mike, démangé par l'envie de revenir, réalise son come-back, again. C'est une aubaine pour la Ligue, évidemment, mais aussi pour tous les magazines spécialisés sur le basket américain. Nous, on boit du petit lait, même si l'idée qu'il joue avec une autre équipe que Chicago me déplaît un peu, tant il a marqué les mémoires collectives sous le maillot 23 des Bulls. Je ne l'ai jamais vu en match officiel, aux couleurs de Washington, si ce n'est à la télé, mais deux ans plus tard, je saisis la dernière chance de le voir éclabousser de sa classe la NBA. A 40 ans, il est sélectionné pour le All-Star Game, qui se tient à Atlanta.

Atlanta. La ville de Coca-Cola. Une cité sans âme où je me sens mal dès mon arrivée, sous la pluie. Je peine à trouver le motel que j'avais choisi. Il est loin, à 40 km du Downtown, à l'une de ces sorties d'autoroute où le décor est invariable - un Mc Do, un Denny's, un supermarché et des motels plutôt glauques.. Le malaise persiste et je ne sais pas l'expliquer. Je n'ai jamais vraiment eu peur aux Etats-Unis, y compris dans le Bronx où j'ai eu la "chance" de séjourner (y'a moyen de rigoler, je vous dis), mais là, je suis sur mes gardes.

Depuis les attentats de Septembre 2001, l'Amérique a rangé au placard ses airs avenants et ne complexe pas de présenter un visage paranoïaque. Lorsque j'arrive à Atlanta, l'alerte orange a été déclenchée. Il ne s'agit pas de météo, mais du risque terroriste. Ce qui explique les reportages alarmistes des chaînes nationales, et les hélicoptères qui tournoient sans discontinuer au dessus de la ville. Atlanta semble en état de siège. Les sirènes de police hurlent, dehors, et j'éprouve les plus grandes difficultés à m'endormir.

On frappe à ma porte en pleine nuit. Je crois divaguer, en plein jet-lag. Le téléphone. Je regarde l'heure. Mon compagnon? La voix est très grave. Le type est graveleux, prend un air sirupeux, au début, puis m'agresse. Il me demande pourquoi je suis toute seule. A la façon qu'il a de me décrire, il ne fabule pas: il m'a vue et n'est pas loin. J'ai peur.

Je raccroche, j'appelle la réception qui m'affirme qu'elle ne m'a passé personne. Donc, si j'ai reçu un coup de fil, cela provient bien de l'hôtel. Je fais comment, maintenant ? Je raccroche. J'aurais besoin d'un maître yogi, là, pour rester zen. A défaut, je panique. Il rappelle. Nouvelle proposition indécente. Je le menace de prévenir la police, lui raccroche au nez pour décrocher aussitôt le combiné. Je reste ainsi dans le noir, sans oser bouger. Je flippe.

Je ne ferme pas l'oeil de la nuit, évidemment, mais résiste à affoler mon compagnon, resté en France. Au petit matin, je tente de soulager un peu mon esprit traumatisé avec mon chef. Lequel bredouille, pas à l'aise, et finit par me demander si je ne pourrais pas... lui envoyer mon premier papier au plus vite. Et évidemment, hors de question de changer d'hôtel, j'ai déjà réglé et ça coûterait de l'argent à la boîte.

Genre, compréhensif. Et mon corps, rapatrié en France, ça coûterait aussi?

Totalement parano, je retarde le moment de sortir de la chambre. Je n'en peux plus, j'appelle mon compagnon, forcément impuissant, à des milliers de kilomètres de là. Comme prévu, il est mal. Mais cela n'arrange rien.

Finalement, une femme de chambre -sosie de l'intendante de Scarlett O'Hara dans Autant en emporte le vent - vient à mon secours, me fait changer de chambre et m'annonce en levant ses poings grassouillets que si ce type remet ça, il aura affaire à elle. J'ai envie de lui sauter au cou.

Je vous laisse imaginer la quinzaine passée dans le coin... Totalement sous le choc, limite dépressive, je suis allée chaque jour couvrir le All-Star Game, dans le Downtown, craignant, le soir venu, de rejoindre ma sordide sortie d'autoroute et de me jeter dans la gueule du loup -pendant que mes chers confrères français allaient s'empiffrer tranquillement aux frais de la princesse.

Et le rapport avec Michael Jordan, alors?

Eh bien, lui seul a réussi à me redonner le sourire. Bon, il a eu du mal à retrouver la mire, au début du match, mais a réussi le tir victorieux dans les ultimes instants, as usual... Dans la salle, chacun a saisi sa chance d'assister ainsi à la dernière révérence du champion. Et l'a écouté religieusement lorsqu'il a fait ses adieux, aux côtés d'une Maria Carey énamourée, en robe moulante aux couleurs du maillot de Jordan, LE 23 des Bulls.

A 40 ans, Jojo avait toujours la classe. Les reporters blasés ressemblaient à des gosses devant un paquet de bonbons, simplement heureux d'être là, conscients de côtoyer un extraterrestre. A cet instant, j'ai tout oublié, la tension, la peur, ma vulnérabilité. Et lorsque j'ai de nouveau croisé Super Mike en 2006, c'est ce que j'ai eu envie de lui dire.

A suivre...

jeudi 2 juillet 2009

Jojo et moi, part 3

La sortie héroïque de Michael Jordan permet aux Bulls de revenir à Chicago en laissant la pression sur Utah... Et, à ma petite échelle, sur moi, consciente que je dois rendre le papier sitôt la fin des Finales NBA. Je suis revenue au même hôtel craignos qu'à mon arrivée dans la Windy City, coincé entre un boulevard sordide et une station-service minable. Bien décidée à m'avancer au maximum, je m'enferme dans la chambre du motel, résistant aux appels de la cité, qui me crie de profiter de ses petites merveilles. La gérante vient frapper à ma porte. Et m'ordonne de fermer les rideaux. Devant ma mine interloquée, elle répète et justifie son accès d'autoritarisme: les petites frappes du coin n'hésitent pas à casser le carreau et à agresser les naïfs qui osent vouloir rester dans leur chambre à la lumière du jour...

L'Amérique.

J'obtempère. Me voilà à bosser, rideaux fermés et petite lampe de rigueur, laquelle vit là ses dernières heures si j'en crois ses chuintements. J'allume la télé et Michael Jordan, ce héros, passe en boucle sur toutes les chaînes nationales. Tous les "spécialistes" s'accordent désormais à dire que les Jazz ont laissé passer leur chance. J'anticipe le scénario du prochain match: les Bulls vont emporter leur cinquième titre NBA sur un dernier tir de Jojo l'unique. C'est tellement écrit que je pourrais balancer mon papier ainsi, avant même la rencontre.

En attendant, je file à l'entraînement, au United Center, et suis interceptée à l'entrée par un reporter d'une chaîne locale de Chicago. Il me demande de me poster devant la statue de Michael Jordan et de répondre à quelques questions sur la popularité de la star en Europe. L'intervieweuse interviewée.

Allez savoir pourquoi, je n'ai jamais cherché à regarder ce grand moment de la télé américaine. Mon papa aurait été certainement ravi de me revoir sur le petit écran. Mais j'ai ma fierté.

De toute façon, dès le lendemain, les confettis et l'air archi-connu de Queen - "we are the chaaaaaampions..."- ont envahi les écrans chicagoans. Les Bulls l'ont effectivement emporté. Mais pas comme je l'imaginais. Dans les dernières secondes, à l'issue d'une partie disputée mano-a-mano et d'un temps-mort hautement stratégique, Michael Jordan s'empare du ballon. Toute l'assistance du United Center attend fiévreusement que Jojo enclenche le tir. Lui prend tout le monde à contre-pied en passant la balle de match à John Paxon, shooteur émérite. Switch. Les Bulls sont champions.

Derrière moi survient une femme énorme, la main dans le pop-corn... Qu'elle était allée chercher pendant le fameux temps-mort stratégique. Elle n'a absolument rien vu du final. Elle n'en a cure. Elle mange. Et puis, Jordan, il en fera bien d'autres...

A suivre...