jeudi 19 septembre 2024

Un chiffre rond, avec des bords acérés

 

La lune hier soir. Les ténèbres sont proches :)

Aujourd'hui, j'ai 50 ans.

50 ans.

50.

Un chiffre rond, mais les bords du 5, ils piquent quand même un peu.

...

Voilà deux ans, lorsque j'ai découvert qu'Abricotine squattait ma caboche sans vergogne, je me suis promis de célébrer mes 50 ans. Je savais que je n'allais pas en mourir, de cette saleté d'incruste, mais enfin, elle m'avait bien rappelé à l'ordre quant à l'urgence de la vie.

Plus que jamais, je sentais cette urgence, oui, à savourer tous les moments forts, parce que tout s'évanouit si vite... Je sentais, aussi, l'apprentissage du temps long, moi qui ai toujours été en mode speed. 


Deux ans plus tard, alors que sonne le glas (vous avez dit drama queen?), je traîne des pieds pour marquer cette espèce de bascule qui s'opère en moi. Ah, le temps long, je l'ai tellement expérimenté que j'ai besoin d'un moment pour me mettre en route. C'est ça, la vieillesse - ou tout du moins le début, j'en conviens - j'imagine.

50 ans, c'est pas un moment où la finitude se révèle? Le moment où on réalise qu'au moins les deux tiers de notre existence ont filé? 

Les bords du 5, ils piquent un peu, je vous le dis.

J'ai 50 ans, et pourtant, je continue de tomber à vélo. Régulièrement. J'ai 5 ans quand on me dit qu'on va à la mer ou en Bretagne. A peine plus quand on me parle de chocolat. Oui, j'ai 5 ans quand il s'agit d'aller danser, faire les 400 coups ou entendre le brame du cerf dans une forêt du chemin de St Jacques de Compostelle, j'ai juste l'âge de lire dès que je franchis la porte d'une librairie et je suis à peine plus mûre sur un terrain de basket.

Mon visage s'est creusé raisonnablement, les rides m'ont à peu près épargnée et les cheveux blancs restent rares - quoiqu'agaçants. Ma taille s'est arrondie, pour mon plus grand malheur, moi qui me suis battue toute ma vie contre le poids. Je suis épuisée si je fais plus d'une activité par jour et la sieste est devenue l'un de mes loisirs les plus réjouissants.

Je sais, je vends du rêve. Merci Mamie.

Je suis triste et excitée simultanément. Je nourris une forme de nostalgie face à ces moments que je n'ai pas su apprécier à leur juste valeur, à l'époque, ou que j'ai vus fondre comme neige au soleil. J'ai plus que jamais envie de me lover dans les bras de ma copine la mélancolie. Je me sens comme un petit animal blessé par les derniers aléas de la vie, mais qui aurait envie d'explorer, encore, vaille que vaille, ce qu'il reste à vivre.

J'ai 50 ans. Mon fils, bientôt 21, a quitté la maison. Mon père, 75, continue de voir des rillettes dans le ciel, lui qui m'a rappelée, au téléphone, il y a quelques minutes de cela, combien, voilà 50 ans, ma mère avait souffert. Je ne suis sortie de son ventre que sous la menace des forceps. Hop, hop, hop, téméraire mais pas trop, j'ai sans doute compris, du haut de mon statut fœtal, que la vie n'allait pas forcément être toujours douce, qu'elle ressemblerait parfois à un champ de bataille, parfois à un tango maîtrisé. Mais qu'il fallait y aller.

J'ai compris, avec les coups passés, que ma coquille, celle qui m'a protégée, s'est avérée fort encombrante. Qu'Abricotine m'a aidé à détricoter complètement les derniers verrous pour m'offrir un cadeau précieux: m'accepter telle que je suis, avec toutes mes failles. Je vous écris cela alors que j'ai pleinement conscience que les hormones bousculeront bientôt ces belles (vaines?) croyances, parce  que 50 ans, si c'est l'adolescence avec une carte bleue, comme en rit si bien Florence Foresti, c'est aussi le temps de la ménopause, qui traîne pour l'instant la même nonchalance que celle qui m'envahit souvent, mais qui finira bien par survenir et faire sauter la sagesse de ce jour.

J'ai 50 ans, je viens de perdre mon travail. Demain, c'est l'inconnu, mais je vais faire comme j'ai toujours fait: un pas après l'autre. A chaque jour sa peine - ou sa joie, selon l'humeur.

On ne peut plus faire mine, à 50 ans, non? Finies les postures. Je sais dire aujourd'hui ce qui me traverse. J'ose davantage. J'exprime mes ressentis. Je donne mes pré-requis. Pas question d'accepter tout et n'importe quoi, j'ai appris à me respecter davantage. C'est bien le luxe d'une femme de 50 ans, pas vrai?

Pourtant, la petite fille n'est pas toujours si loin. Saurais-je un jour dire "Je t'aime", sans rougir ou appréhender je ne sais quelle catastrophe? Sans imaginer que mon karma va aussitôt m'en remettre une petite couche? Je commence à le faire. Ce n'est pas simple pour moi. Mon amoureux et mes amis, ma famille aussi, le savent, je pense. La mue est en cours et continuera de se faire.

La mémoire, tant qu'elle résiste, permet tellement de surfer sur cette vague mêlée de joie, de résilience, de souvenirs doux-amers, de bonheurs furtifs, que j'enregistre le moindre rire, le moindre éclat, ce léger sourire qui se dessine, face à moi. Je savoure doucement chaque bouchée, me délecte de chaque miette et laisse mon corps se gorger de ce frétillement. Je prends, je prends, je prends. Avec une envie folle de partager cet élan.

J'ai 50 ans. Et j'ai décidé que ce chiffre rond serait synonyme de douceur, même si je sais que les bords du 5, quand même, ils piquent.

vendredi 5 juillet 2024

La femme qui haussait les yeux au ciel

 Voilà quelques semaines, j'ai eu envie d'écrire ici sur un deuil, que j'étais en train de vivre. Et puis, je ne sais pas, une forme de pudeur, peut-être, le besoin de digérer surtout, je me le suis interdit. Lorsqu'est arrivée la vague RN, j'ai cherché à relativiser. Que valait ma peine intérieure comparé au désastre imminent pour notre pays?

La gueule de bois, j'espère ne pas l'avoir lundi. Mais là, je suis dévastée, sans doute sensibilisée par un trop-plein d'informations que j'ingurgite, mais à titre très personnel aussi, par une consultation chez ma neurochirurgienne. Je croyais être tombée sur le champion du manque d'empathie et avais demandé à changer. Lorsque je l'ai vue l'an dernier, je n'avais pas été marquée par une chaleur époustouflante. Mais là, j'ai pris cher cet après-midi.

Alors, bonne nouvelle, Abricotine fait moins la maligne et a commencé à se ratatiner, merci les rayons. Pourtant, étonnamment, je suis sortie en pleurs de cette entrevue qui aura duré moins de dix minutes. On expédie ça, madame, vous avez une tumeur bénigne qui ne prend plus que 3 ou 4 cm dans la tête, vous n'allez pas m'empêcher de partir en week-end, hein.

Ce qu'elle n'a pas compris, c'est que cette bille à qui on n'avait rien demandé, qui est venue bousculer mon existence, que j'ai bénie par moments, et qui m'a permis de vivre autrement, eh bien, elle laisse des traces. Ce deuil dont je vous parlais, c'est le deuil de mon ancien moi, tout simplement.

Je l'ai déjà écrit, ça m'a bien soulagé de tourner la page, de faire reset et de démarrer plus lentement, de savourer tout ce qu'il y avait à prendre, de vivre et d'exister.

Je n'avais juste pas envisagé que le nouveau moi serait livré avec une batterie à plat, sans résistance et avec quelques petits accrocs (sensibilité à la lumière, au bruit, vertiges, je vous passe les détails). On n'est pas sur une première main et ma capacité intense de travail s'est réduite à peau de chagrin. Quand, en juin, j'ai reçu ce courrier de la sécu m'indiquant une invalidité, je n'en ai pas tout de suite saisi la portée.

Au fil des jours, tu comprends. Ce concept de "handicap invisible", je le vis maintenant pleinement. Dans ce cabinet froid de l'hôpital, j'ai essayé d'expliquer cette immense asthénie qui ne me quitte plus beaucoup, les aménagements que j'ai dû imposer à mon travail avec un temps partiel. Ces vertiges, cette hyperacousie, mon évitement face aux grands magasins et à la foule.... En face, j'ai vu une femme qui se retenait de hausser les yeux au ciel et qui m'a répondu, d'un ton terriblement méprisant, qu'elle ne voyait pas le moindre rapport avec ma tumeur, que je devrais songer à voir mon médecin pour qu'il me redirige.

Vers un psy, tu veux dire, madame la sachante? Je ne suis pas la dernière à avoir consulté, c'est ok pour moi. Elle insinuait juste que j'étais dépressive et que, bon, là, faudrait penser à partir, parce que c'est pas tout ça, mais va y avoir des bouchons sur la route.

Je me sentais minable, à me plaindre telle Cosette. Elle a juste creusé un peu plus le trou. 

Je suis sortie en pleurs, dans le couloir, ne pouvant retenir davantage ce mélange de colère et d'incompréhension face à une attitude aussi méprisante. 

J'ai enfourché mon vélo, pédalé de toutes mes forces, longé la Loire, prolongé la balade en espérant que la nature m'aiderait à retrouver mes esprits, à m'apaiser, à me connecter de nouveau avec ce sentiment de sérénité qui m'accompagne souvent.

Entre la voiture qui ne fait même pas mine de freiner pour t'éviter et ces piétons qui squattent la piste cyclable, autant vous dire que la méthode ne s'est pas avérée très efficace.

Il fera jour demain.

On va résister à la menace fasciste, je vais oublier cette femme maltraitante et me concentrer sur la bonne nouvelle du jour: Abricotine se ratatine.

Oui, il fera jour demain.

samedi 29 juin 2024

Le jour où j'ai demandé de ne pas essayer le vitriol

 Un dimanche ensoleillé, à la campagne. Nous nous mettons à table, nous sommes une dizaine d'amis, nous n'avons pas 30 ans.

Nous sommes en avril 2002. Le week-end précédent, Jean-Marie Le Pen a fait près de 18% au premier tour des élections présidentielles, évinçant Lionel Jospin. Il n'y aura pas de duel droite/gauche pour la présidence. L'extrême-droite est au second tour et avec elle la résurgence de vieux traumas et des peurs légitimes, me semble-t-il. Celles de voir son pays sous l'éteignoir de l'extrême-droite.

Je crois que, parfois, j'aime mettre les pieds dans le plat. Depuis une semaine, je suis catastrophée. Je me demande comment c'est possible. C'est vrai, nous sommes en colère contre les hommes politiques et je me suis personnellement fendue d'un vote de contestation - j'ai voté Noël Mamère. La chute de Jospin, c'est les gens comme moi qui l'ont engendrée (bon, on est d'accord, la gauche s'était tiré une balle dans le pied toute seule, à l'époque) (mais ça n'enlève pas ce goût amer de la culpabilité qui ne m'a jamais quittée) (Noël Mamère) (bref).

J'aime mettre les pieds dans le plat, disais-je. Nous sommes dix à table. Je les regarde un par un. Si on suit les statistiques, y'en a bien un ou deux qui a donné son vote au Front National. Je demande à la volée que la ou les personnes qui l'ont fait, non pas se "dénoncent" mais m'expliquent. J'ai toujours besoin de comprendre. C'est chiant, mais c'est comme ça.

Je sais aussi qu'on ne parle pas des sujets qui fâchent, avec les amis, paraît-il. Trop tard.

Regards interloqués, bouches fermées, ils me scrutent et le silence s'installe. Et puis, l'une des personnes, sans doute plus courageuse que les autres, m'explique qu'elle n'en peut plus des femmes voilées dans les transports. Et commence à dérouler le discours habituel, sur l'envahissement supposé de nos contrées par des sarrazins à qui on a rien demandé, mais à qui on donnerait tout.

J'ai envie de vomir, à l'époque, écoutant ce flot pas encore décomplexé - elle a conscience, je crois, de franchir la ligne, mais c'est devenu trop pesant pour elle de se taire, de se laisser faire.

Je n'en peux plus, je me lève. Je quitte la table, prends mes affaires et décide de rentrer à pied. Ma bravoure est vite limitée par un élément factuel: nous sommes à 25 km de la ville dans laquelle j'habite à l'époque. Après avoir marché quelques centaines de mètres, je suis rattrapée par mon compagnon d'alors, qui tente de me "raisonner" - visiblement, c'est moi qui ai semé le trouble (j'avais pas ça en tête).

Je regarde la route devant moi. On va mettre un paquet de temps à rentrer, ma colère, mon désarroi et moi, alors je le suis et ne décroche plus un mot de la journée, avec ces gens qui, entre-temps, sont passés à quelque chose, rient, parlent, s'amusent comme si de rien n'était.

...

29 juin 2024.

A la veille du premier tour des législatives, je réalise que ma colère et mon désarroi ne m'ont jamais quittée, face aux discours actuels. "On a qu'à essayer", slogan lunaire, pour le moins, pour laisser les manettes du pouvoir à un parti xénophobe et sans aucun fond autre que celui construit sur un terreau de haine et de fascisme.

Le Rassemblement national est aux portes de cette accession qu'il fantasme depuis tant d'années et, justement, ce n'est plus un fantasme. Oui, évidemment, autour de moi, je ne vois que des personnes aussi catastrophées que moi - qui se ressemble s'assemble - mais j'entends aussi ce "on a qu'à essayer", comme pour suivre la stratégie de notre cher président : "vous voyez bien, je vous l'avais dit que c'était de la merde, dans deux ans, vous re-voterez pour moi."

Ou pas. En aura-t-on au moins la possibilité, déjà? Où en sera ce qui n'est plus déjà plus une démocratie depuis le macronisme? Soyons clair, je n'ai aucune intention de redonner un jour ma voix à cet homme irresponsable qui a précipité notre chute - je l'ai fait naïvement en 2017, merci, j'ai eu le temps de réfléchir depuis.

Moi, j'ai jamais essayé de boire de l'eau de javel ou de mettre le feu à mes cheveux pour voir comment ça faisait.

En 2002, j'avais eu peur, comme tous ces Français qui ont voté massivement pour Chirac au second tour des présidentielles, tel un pare-feu au fascisme. La menace était là mais sincèrement, qui aurait cru un jour que le peuple français, qui s'énorgueillit du "Liberté, égalité, fraternité", en viendrait à donner les rênes à des gens qui fondent leur marche sur la destruction de l'autre, sans solution par ailleurs?

J'écris ces mots et je me sens tellement naïve et vide, tant la sidération s'est emparée de moi.

J'ai toujours pensé qu'avoir grandi dans une banlieue parisienne, où toutes les couleurs et nationalités étaient représentées, avait constitué une chance pour moi. La question de la différence, je ne me la suis pas posée. Elle était là face à moi et, du haut de mes 6 ans, la seule chose que je n'ai pas comprise, en arrivant dans un quartier nantais plutôt BCBG, c'est pourquoi il n'y avait que des blancs dans ma classe.

J'ai élevé mon fils dans ces valeurs. Quand il m'a demandé, avec sa petite trogne, pourquoi notre voisin était noir, alors qu'on était tous les trois dans un ascenseur exigu, je lui ai juste conseillé de poser sa question directement au monsieur. Ce que ce dernier a fait. La différence peut interpeller; pourquoi devrait-elle faire peur à tout prix?

Naïve? Peut-être. Sûrement, même. Je suis une utopiste. Sans pouvoir comparer ce que vivent des populations entières aujourd'hui en France, qui n'ont pas eu l'outrecuidance de se repeindre la face en blanc, j'ai senti une fois ce parfum malaisant du racisme, à mon encontre. Oui, une seule fois, qui m'a suffi à réaliser l'injustice et la cruauté, l'envie de défiance qui s'engouffre en soi, aussi, face à autant d'hostilité illégitime.

A Atlanta, ville noire à 96%, je suis rentrée un jour dans un restaurant, situé à une sortie de l'autoroute, dans ces drôles de zones totalement dépersonnalisées où le seul point commun est le Denny's, le Mc Do et un Motel 6 crasseux. J'étais là-bas pour le All Star Game de la NBA, il était 16h et je n'avais toujours pas mangé. J'arrive donc, pousse la porte et sens d'emblée le malaise. C'était un dimanche, les gens étaient attablés en famille et je suis saisie par l'intensité du regard d'une petite fille, qui me dévisage, tourne les talons et va voir sa grand-mère en me montrant du doigt.

Je ne comprends pas, au début. Ai-je une patate sur la joue ? Je commande, et je sens la pesanteur de ces regards sur moi. Je n'exagère pas. Ils me scrutent, plus que perplexes quant à ma présence à leurs côtés.

Je suis une blanche au milieu des noirs, et clairement, je ne suis pas la bienvenue.

Autant vous dire que je n'ai pas terminé mon repas, que j'ai pris mes cliques et mes claques, effarée de cette situation que j'ai provoquée sans même y avoir songé. Je me suis sentie l'étrangère. Celle qui n'a rien à faire là. J'ai pensé à ce que ça doit faire, d'être un arabe en France.

C'est complètement irrationnel. Tout simplement. 

Aujourd'hui, la parole est décomplexée. Au boulot, c'est une dame qui m'explique au téléphone que son fils a perdu sa carte d'identité, et que celui-ci lui a rapporté que, "quand même, y'avait beaucoup de migrants avec lui ce jour-là". Insinuations perfides et abjectes, que la femme te balance sans vergogne.

Ce n'est pas nouveau, évidemment. Je me souviens de cette agent immobilier qui, croyant me rassurer, m'avait dit, alors que j'emménageais dans un appartement au 1er étage, situé dans un immeuble du centre-ville: "Ne vous inquiétez pas, ils sont tous au 4e étage.

- Ils?" lui avais-je répondu, interloquée, incrédule.

"Oui, vous savez, les familles africaines."

J'avais vraiment besoin de cet appartement. Je me suis contentée de lui dire combien j'étais choquée par sa réflexion, mais j'ai quand même emménagé. A l'époque, elle s'était sentie bête, mais maintenant? Qu'en serait-il?

Aujourd'hui, c'est cette élue du RN qui assure fièrement que "ces gens-là, si on ne les voit pas le matin au marché dans lequel elle tracte, c'est parce que ce sont des fainéants, qui ne font rien de leur journée". Toutes ces caricatures, tous ces clichés purement xénophobes, qui sont (pour l'instant) punis par la Loi, combien de votants français vont les autoriser explicitement par leur adhésion au RN ce dimanche, et le suivant?

Oui, je sais, j'ai un discours très simpliste, il n'y aucune analyse de ma part, je réagis sous le coup de l'émotion. Mais je ne peux pas croire qu'on en soit là. La priorité est-elle vraiment de dévoiler les femmes? De traquer tout musulman? N'y a-t-il pas plus urgent, des hôpitaux, des écoles, des services publics, à gérer?

Je me sens impuissante.

J'irai voter demain, pour le Nouveau Front Populaire, parce qu'à ma minuscule échelle, c'est le seul geste utile que je puisse faire.

Je ravale ce goût de vomi qui me vient en bouche. Décidément, c'est pas bon, l'eau de javel.

samedi 9 mars 2024

Enterrement à 4 heures!

 Au début, c'était une gouttelette. Et puis une autre. J'ai poussé le son de mes écouteurs et, dans un élan masochiste de mélancolie, j'ai fermé mes yeux déjà embués et fais marcher la boîte à souvenirs.

"Enterrement à 4 heures! "A crié mon père au téléphone, dimanche, alors que mon fils et moi l'appelions pour prendre de ses nouvelles, des nouvelles de ma mère, aussi, submergée. Mon père venait de faire une nouvelle crise d'épilepsie et avait du mal à refaire surface mais, tout en confondant les mots, il savait encore dire qu'il voulait mourir et que l'enterrement, donc, serait à 4 heures.

Ironique, pour un gourmand comme lui, qui aimait tant l'heure du goûter, quand les yeux du petit enfant qu'il fût brillaient si fort à la vue d'un gâteau.

Enterrement à 4 heures!

Je lui ai répondu que c'était pas possible, parce qu'avec mon fils, on ne serait jamais rentré à temps.

Habituellement, ce genre d'humour noir à trois balles désamorce son agressivité, apporte un peu de répit dans son quotidien devenu soudain si lourd, il reste quelques secondes perplexe et prend son air si touchant d'enfant qui a compris qu'on lui a fait une blague.

Là, j'ai fait chou blanc. Il a râlé plus fort et rappelé l'heure funeste.

Rendez-moi mon papa, ça suffit maintenant.

Les gouttelettes deviennent larmes torrentielles, mon visage est inondé et je ne cherche plus à freiner le flot, le chagrin envahit toutes les parcelles de mon corps.

J'imagine le pire et je ne veux pas l'envisager.

Je ravale mes larmes. Affronter la réalité. Etre présent. Garder l'espoir.

Retourner dans cette chambre d'hôpital, oui, la même que l'an dernier à cette époque, témoin de multiples scènes cocasses et lunaires, après son passage en terres lointaines. Avec toujours ce regard clair et à cent mille lieux de nous, bloqué entre des souvenirs d'il y a longtemps et cette réalité qu'il semble saisir par fulgurance, faisant montre d'une surprenante lucidité, avant de replonger dans son monde, entre onomatopées, éclats de rire et insultes. Papa Clown n'a rien perdu de sa verve.

Son imagination s'avère même débordante. C'est une femme invisible qui franchit sa porte, deux aveugles qui l'espionnent, ses parents qui lui font signe ou ce léopard, que le vétérinaire caresse et qui a peur d'un chien.

C'est parfois plus rude, en témoignent les gouttes de sueur qui perlent sur son visage rougi et ébahi, face à ce camion imaginaire qu'il croit voir foncer sur lui, dans cette chambre d'hôpital qu'il assimile à une prison.

Tout se mélange, la peur, l'incrédulité, l'hilarité, la tendresse, la violence et la douceur.

Depuis une semaine, papa est de nouveau ici et ailleurs. J'ai ravalé mes larmes, la vie subsiste. Mais l'équilibre reste décidément précaire et bouleversant. Il y a cette bascule qui surgit, où le rôle naturel attribué à chacun au sein d'une famille se transforme. Ce moment si particulier où, adulte face à la redoutée diminution de tes parents, tu dois prendre le relais et renverser les rôles, alors même que la petite fille - ou le petit garçon - qui est en toi aurait tant besoin d'une enveloppe réconfortante.

Pourtant, au fond, alors que tout vacille, tu sens cette force indicible. Elle te porte, elle porte ton parent, aussi fort que possible. Des miracles, il n'y en a que dans les rêves agités de papa, sans doute. La présence, c'est tout ce qui nous reste et ce à quoi on s'accroche pour le ramener au plus près de notre monde, puisque le sien lui semble inconfortable.

Pour le 4 heures, ça attendra. On a mille choses à vivre avant.

mercredi 10 janvier 2024

Dernier soubresaut (gérer le vide)


 Un jour, au printemps dernier, en pleine introspection, j'ai commencé un manuscrit. Ou au moins une esquisse, un essai, un jeté, que dire... Voilà, j'avais besoin que les mots sortent, que mes émotions s'expriment à travers des consommes, des syllabes, des lettres, des phrases, des paragraphes, des chapitres...

Il y a un passage qui introduisait une partie importante à mes yeux, partie que je n'ai pas encore achevée, d'ailleurs, tant l'expression n'est pas encore totalement affinée et tant, surtout, j'ai délaissé ce projet, pour me remettre un peu en marche, dans la vie dite normale où on se lève le matin, on va travailler, on rentre, on se couche, fatigué, et on néglige les essentiels, ces petits riens qui illuminent le quotidien, cette part de création que l'on a en nous mais qui a besoin d'un minimum de concentration et de temps pour se libérer.

Bref, je m'égare, mais j'énumérais les expériences - tellement typiques, peut-être banales, aussi, d'une Occidentale du 21e siècle - que j'avais vécues dans ma vie, ayant le sentiment de constituer un vrai appel à témoins à moi toute seule, tant je réunissais nombre de faits de société. Je checkais. L’anorexie. La boulimie. La vie en couple. La séparation. La vie de maman solo. L’enfant « atypique », harcelé. La vie de célibataire. La reconversion professionnelle. La création d’entreprise. Le burn out.

Des moments parfois douloureux mais pas rares, voire parfois tristement communs, chez nos contemporains.

Bon, la tumeur cérébrale et le kidnapping en Tunisie, ça, c'était le petit truc en plus, mais devais-je en faire une fierté? Disons que je préfère aujourd'hui en rire. Pour le reste, je me sentais un peu blasée, comme si tout le dur était un peu passé. Et que la vie n'était devenue qu'un beau champ de fleurs, un terrain de jeu accueillant, tel un tapis rouge jusqu'à la sérénité.

Je pourrai aujourd'hui rajouter une ligne. La liquidation judiciaire.

L'exercice s'apparente à... la plonge en cuisine. Quand vous croyez qu'il n'y en a plus, en fait, y'en a encore. C'est un principe, ne me demandez pas pourquoi. Mais au moment où vous cédez les rênes de votre entreprise à un mandataire, pensant naïvement que vous allez pouvoir dormir sur vos deux oreilles, paf!

Les surprises s'enchaînent. C'est le client retardataire qui répond trop tard au mail que tu lui as envoyé, qui t'adresse son RIB pour remboursement alors que les jeux sont faits. C'est la banque qui t'annonce le passage en contentieux, qui te menace en évoquant un remboursement des prêts à titre personnel, quand tu croyais être cautionnée à 100%, et qui bloque l'accès à ton appli. C'est ta ligne téléphonique qui est coupée. C'est la mandataire qui t'annonce que tu devras payer sur tes fonds propres - oui, encore - les cotisations sociales pendant trois mois encore, pour un statut de travailleur non salarié auquel tu as renoncé depuis un moment.

C'est ton propriétaire qui réclame légitimement son loyer et qui tente les yeux doux et l'apitoiement pour t'amadouer. Et qui, ayant compris que l'affaire est morte, t'envoie le lendemain un cinglant "Bon, après tout, c'est vous qui êtes le plus à plaindre, finalement." Légère allusion à Abricotine, dont je lui avais finalement révélé l'existence.

Euh???

Les émotions surviennent. A la banque, ce sont tes moyens de paiement que tu rends, sur un coin de bureau, en signant un papier que le conseiller - gentil, mais doté d'une tension proche du néant - manque de tâcher avec sa tasse de café chaud. Le type est nonchalant et te sourit, sans imaginer une seconde que tout ton corps est secoué intérieurement de spasmes. Il imprime son papier et quand tu le prends, ce sont les derniers souvenirs qui partent en miettes. Il n'en sait rien. Toi, tu as envie de le secouer pour qu'il réalise, qu'il compatisse, qu'il... Mais en fait, non rien, que peut-il y faire? Il n'a pas idée de la tornade interne et c'est ok. 

Ce sont les recommandés, que tu n'ouvres même pas, sur le moment, qui parlent de jugement, de procédure, comparution, cessation et autres joyeusetés du type enchères et menaces d'interdiction de gérer.

Ce sont les clés du local que tu rends, le matériel que tu laisses, le dernier regard que tu poses sur ces murs qui ont tout connu, ta joie et ta détresse, ta peine et ta folie.

C'est la vie qui défile, c'est ton coeur qui défie la raison dans un dernier soubresaut, c'est la flamme qui s'éteint. C'est ce que tu veux mais que tu ne veux pas, en fait. C'est comme un enterrement alors que tu es vivant.

C'est ta naïveté qui te navre. A quoi m'attendais-je? Evidemment que c'est un passage fastidieux, forcément que le moment n'est pas des plus sympas. A quel moment ça rentre dans une bucket list, une liquidation judiciaire, hein?

Pourtant, malgré le renoncement, je vais bien, vraiment. J'avais besoin d'éprouver cette perte, j'imagine, et de réaliser à quel point la liquidation judiciaire joue effectivement son rôle, celui de vider de sa substance quelque chose pour lequel tu as tant vibré il n'y a pas si longtemps.

Absurde, peut-être un peu, mais forcément salvateur.

mercredi 3 janvier 2024

Sans gueule de bois




Un temps bas, gris, de gros nuages menaçants, ce petit crachin breton caractéristique de la région, le cri glaçant des corneilles le long de la Loire... Oui, l'atmosphère était lugubre, ce matin. Par terre, dans le caniveau, comme un restant de gueule de bois, une canette, une écocup, des restes d'un réveillon tout proche, pour fêter la fin d'une année et le début d'une autre.

En moi, j'ai senti ce même basculement entre deux mondes.

Ce matin, j'allais au tribunal de commerce pour demander une liquidation judiciaire de mon entreprise. Etranges sentiments entremêlés, entre délivrance et pointe de nostalgie, détermination et vulnérabilité. La décision a beau être prise depuis longtemps, le cœur s'amuse toujours à lancer quelques miettes d'un passé idéalisé, à jouer les avocats du diable, à rendre l'esprit incertain.

Et si... Et quand... Et avec...

Mon cerveau, qui n'a pas pourtant pas besoin d'un tel tourbillon, se laisse submerger par les questionnements stériles. Mon corps tremble. Mon cou est douloureux - un torticolis me tenaille depuis deux jours, allez savoir pourquoi...

L'instant s'avère solennel et, je ne peux le nier, un rien pénible. L'attente dans la salle dédiée interminable. La boule au ventre, je me lève, ouvrant cette porte vers le néant. Oui, je vais chercher le néant, prier pour qu'il ne reste rien de ce que j'ai pourtant fièrement développé des années durant, pour lequel j'ai tant sacrifié.

Je m'assois, telle un automate, en face du président de la séance, de deux juges et de la greffière. J'écoute leur introduction, attendant patiemment qu'ils me cèdent la parole pour justifier ma décision. Et là, j'embarque Abricotine dans mon laïus, telle une alliée improbable qui expliquerait - qui explique, au fond - pourquoi j'ai remisé au placard mon bébé, mon entreprise, cette création qui m'a pris tant d'énergie, qui m'a apporté tant de joies mais autant beaucoup de sueur et quelques larmes.

Loin d'être un caprice, cette demande de liquidation judiciaire devenait inexorable puisque jamais plus je ne m'épuiserai de la sorte.

Deux semaines plus tôt, je m'étais cassé les dents, face à un jury perplexe - les fonds n'étaient pas épuisés, l'entreprise n'était donc pas en cessation de paiement. Cette fois, les juges ont accepté ma demande, me libérant de ce fil à la patte. Ma petite entreprise ne m'appartient plus. Sa fin intervient à un moment de ma vie où les priorités ont changé, où les perspectives ont bougé, où la vie me semble plus sereine que jamais. Des regrets? Plus vraiment. Ainsi va la vie.

La gueule de bois, très peu pour moi. En sortant, j'ai regardé le ciel. Il restait bas et sombre. Pourtant, je sentais poindre en moi cette lueur particulière, mélange d'optimisme béat et d'envie de croquer la vie, comme une gamine qui aurait donné son jouet à quelqu'un qui en aurait besoin davantage, pour avancer vers un avenir nouveau, le cœur léger et sans remords.


D'ailleurs, s'il fallait encore un signe, je dois admettre ma stupeur de découvrir, quelques jours plus tôt, que cet arbre de Pen Bé, qui pliait mais ne rompait pas, dont je vous avais parlé comme d'un "symbole de résilience et de sagesse", n'est tout simplement plus aujourd'hui.

Il n'a pas résisté aux éléments, sans doute à la dernière tempête Ciaran. Il a fallu trancher, le couper. De lui, de sa forme majestueuse et étrange, il ne reste que ce tronc.

Comme quoi, même ce que l'on imagine indestructible peut disparaître, sans que la face du monde en soit changée. 

Et c'est OK.

samedi 7 octobre 2023

Les tuméreuses heureuses

La magie d'un gîte, c'est son accueil haut en odeurs...

 A peine une semaine après mon retour sur Terre, aka la civilisation, ses stimuli un rien oppressants et agressifs (supermarché et périphérique, combo gagnant pour ressentir l'ampleur du mal urbain) - mais pas que, évidemment - il est temps de faire un petit bilan de cette expérience hors du temps que nous avons vécue, mon amie et moi. 

J'ai troqué les bâtons de marche contre des... béquilles (périostite tibiale, un mois de repos, bah oui, sinon c'est pas drôle) et j'ai donc débarqué à mon nouveau travail en claudiquant. Très classe, je trouve, mais vous aurez compris que j'ai fait depuis un moment le deuil de ma dignité.

Je ne saurai pas exactement situer à quel moment précis je l'ai perdue. Mon amie me cite quelques instants décisifs, suggérant néanmoins que je lui avais fait la peau dès le voyage en train jusqu'au Puy. Voyager dix heures avec un sac de rando sur le dos, avec une tenue qui sera aussi celle du soir, de la nuit et de la journée après la marche, vous oblige à lâcher prise rapidement, et après deux TER et un car, autant l'admettre; j'ai lâché prise.

Car oui, il faut voyager léger, le plus possible, ce qui suppose quelques concessions. Je ne savais pas encore où ce chemin vers le minimalisme nous mènerait.

Le premier dîner et la nuit dans une cellule du séminaire au Puy passés nous ont vite confirmé qu'on n'était pas sur un all-inclusive de luxe. Sobriété, dépouillement, on travaille sur la pauvreté de soi.

Le premier dortoir, le lendemain, te fait goûter le bonheur de posséder ces petits riens qui changent tout - c'est à dire les bouchons d'oreille, afin de survivre à tous les bûcherons nocturnes de la terre - mais aussi la frontale, qui te permet de lire au delà de 20h sans déranger tous les marcheurs épuisés - allez savoir pourquoi, lorsque la nuit tombe, la furie qui sommeille en moi s'agite et décide que la nuit doit servir à autre chose qu'à dormir.

Les nuits en gîte, où tu te déchausses à l'arrivée en déposant tes bâtons, sont un appel à l'anosmie, ou au moins à l'apnée temporaire, à moins de défaillir dans la seconde. L'odeur des pèlerins devient vite une sorte de repère: on se reconnaît entre nous, suintants personnages sur les routes, et ça finit presque par nous amuser. Sur Saint-Jacques, il y a trois moments particulièrement jouissifs: la douche, le coucher et la pause matinale, quand tu croques dans une pomme au jus délicieux ou que tu gardes en bouche cette banane à la saveur unique. Tous les sens sont décuplés, tout devient divin et intense.

Les forêts traversées, les ruisseaux enjambés, le goût du café préparé par un paysan, posé sur une table, le regard du rebouteux qui te fixe tout en soignant ta jambe, les bribes de conversation partagées le temps d'une montée, le regard khôlé des Aubrac à notre passage, celui, mutin, de ce berger lancé à toute vitesse sur son quad pour libérer son troupeau de brebis et le mettre sur notre route... Ce Mathieu, 38 ans mais déjà usé par l'alcool, qui prend le temps de partager une pause avec nous, au milieu de nulle part... La crédenciale, que l'on pense à faire tamponner alors que l'on est au bout de sa vie, le soir en arrivant au gîte, comme si notre existence en dépendait...

Le coucher, aussi, dont on rêve tous, à un moment de la journée, cet instant où on pourra déposer notre carcasse abîmée sur le lit et rejoindre les bras de Morphée. Pourtant, le soir venu, l'exercice est souvent plus laborieux que prévu. Le corps exprime ses tiraillements, ses raideurs et ne s'assouplit plus. Las, on finit néanmoins par s'endormir, après avoir réduit les douleurs autant que faire se peut à coups de massages et de Doliprane, et récapitulé dans sa tête les kilomètres passés et à venir.

Oui, tout devient intense et divin.

Le silence, enfin, certes parfois perturbé par le bruit sec et lancinant des bâtons... Et par nos éclats de rire et de voix. Car si j'avais espéré un caractère méditatif et introspectif, c'était sans compter sur la façon dont nous avons vécu le chemin, mon amie et moi. Nous avions à cœur d'accomplir ce périple, portées par une envie commune d'éprouver notre retour à la vie, après deux ans difficiles, liés à de graves problèmes de santé pour elle; un an après la découverte d'Abricotine pour moi.

Fatiguées, pas fatiguées, peu importe, nous nous sommes senties plus vivantes que jamais, je crois, portées par le sentiment de liberté et de joie, par l'émerveillement parfois presque puéril ("Oh, un papillon!" "Oh, un nuage!") que nous avons volontiers laissé s'exprimer.

Nous sommes devenues "les tuméreuses heureuses" et, tant pis pour ma dignité, j'ai alimenté parfois bien malgré moi ces fous-rires, ici un cuissard déchiré qui dévoile une partie de mon intimité, là des lingettes qui sortent vertes alors que j'ai essuyé derrière mes oreilles (appelez-moi Shrek), des cascades involontaires sur les chemins, un look de teletubbies congelé en bord de routedes montées d'escaliers à quatre pattes, une confusion entre une poule et un cerf ou encore un avis de décès impromptu.

Alors, au delà du milliard de marches montées, des remontées d'estomac après un aligot bien corsé, du dixième malaise vagal pour être remontée trop vite; au delà de la douleur constante à la jambe ; au delà des discussions existentielles menées parfois sérieusement avec des personnes uniques et attachantes (elles se reconnaîtront) ou des dîners à coup de hamburgers/aligot/petite poire (bisous aux Quebécoises), au delà des paysages lunaires, verdoyants ou désertiques, je veux retenir cette force de vie qui ne nous a jamais quittées et dont je me servirai comme d'un tremplin s'il vient un jour où la tristesse, le découragement ou que sais-je encore s'emparent de mon esprit.